Martha Desrumaux est une figure majeure du mouvement ouvrier français et de la Résistance. Cette militante ouvrière et féministe décédée en 1982 aura voué son existence au service des plus fragiles, des plus démunis. Son rôle marquant, essentiel devrais-je dire, dans la société industrielle, prolétaire et ouvrière de la première partie du 20e siècle a permis de faire bouger les lignes.

Nombreux sont ceux qui demandent aujourd’hui son entrée au Panthéon. De fait, si l’on examine le profil des résidents du Panthéon, qui compte 5 femmes (dont Simone Veil) contre 76 grands hommes, force est de constater qu’il n’y a aucune personnalité issue de la classe ouvrière. On trouve des militaires, des artistes, des politiques, des scientifiques mais aucun prolétaire.

La France aurait-elle honte de ces ouvriers qui l’ont construite? Certes Martha était cégétiste, communiste, féministe d’avant-garde, mais aujourd’hui elle dépasse les clivages! Elle aura consacré ses forces à défendre et valoriser les anonymes, ceux dont le militantisme et le travail ont aussi contribué au développement des valeurs de notre société.

Au feu!

Florimond Calixte Desrumaux, caporal des pompiers à Comines, un bourg du Nord dont l’homonyme belge se situe sur l’autre rive de la Lys, se hâte de sortir de son estaminet. Les cloches de Saint-Chrysole appellent les volontaires à toute volée. Dans la ville hérissée de cheminées d’usine, les rares automobiles sont celles des patrons du textile. C’est en charrette à bras que Florimond livre le lait, l’épicerie et que l’on transporte la pompe à eau. Vite, le feu! Une embardée, et l’homme, 50 ans à peine, se retrouve écrasé sous la masse.

Florimond meurt de ses blessures le 4 août 1906, non sans avoir recommandé à son fils Émile, jeune socialiste, d’agir toujours selon sa conscience. Radical-républicain, laïc, le père Desrumaux a toujours affiché ses convictions de gauche, même si elles lui ont coûté son emploi d’ouvrier gazier quelques années auparavant. Un vent nouveau se lève en ce début de 20e siècle: en 1904, Jean Jaurès a fondé L’Humanité; en 1905, la République a garanti la liberté de conscience et prononcé le divorce des Églises et de l’État; la même année, la Section française de l’internationale ouvrière (SFIO) a rassemblé les marxistes de Jules Guesde et les socialistes de Jaurès.

Martha Desrumaux, autodidacte de choc

Quand son père meurt, Martha, sixième de sa fratrie, n’a pas encore 9 ans. Elle est née le 18 octobre 1897 à Comines (Nord), dernier jour de la […]