Face caméra, Andrew Tabler, ancien membre du Conseil de sécurité nationale à Washington, assure : “La Syrie a été le laboratoire de la Russie pour préparer son intervention en Ukraine”. Dans son documentaire Russie. Le laboratoire syrien, toujours disponible sur Arte, la journaliste Édith Bouvier montre comment la guerre civile en Syrie a été le terrain d’entraînement des forces du Kremlin. Elle établit un parallèle entre l’intervention de l’armée russe dans le pays dirigé par Bachar al-Assad et l’invasion de l’Ukraine.
Concernant les frappes aveugles qui, dès la fin du mois de février, se sont abattues sur l’Ukraine, elles “ont lieu depuis dix ans en Syrie”, observe, le 1er novembre, la journaliste spécialiste du pays auprès de Télérama, qui fait au passage l’éloge d’une “remarquable” enquête. “Je revoyais Alep, Homs, les avions russes et l’angoisse des populations. Je retrouvais aussi cette même communication mêlant quelques éléments réels à de la propagande. En Syrie, Poutine justifiait son intervention en en faisant une pseudo-guerre contre le terrorisme, en soutien et à la demande réelle de Bachar al-Assad. Les terroristes syriens sont les nazis d’Ukraine”, poursuit-elle.
Tournant de 2013
Pour Édith Bouvier, quand Vladimir Poutine décide de frapper la Syrie, il pense déjà à l’invasion de l’Ukraine. Selon elle, le tournant intervient même avant, en 2013, lorsque les États-Unis prennent la décision de ne pas intervenir alors que le dictateur syrien a franchi la ligne rouge en usant d’armes chimiques contre sa propre population. “L’administration Obama donne ainsi son feu vert et la Syrie va servir de tremplin pour la politique de reconquête de Poutine, qui s’octroie au passage un statut de superpuissance internationale”, souligne-t-elle auprès de Télérama.
La non-réaction occidentale est perçue par le maître du Kremlin comme un aveu de faiblesse et, six mois plus tard, la Crimée est envahie. “Pour Vladimir Poutine, l’objectif est de réduire autant que possible l’influence de l’Occident. Je pense que les États-Unis auraient dû s’en rendre compte plus tôt”, commente l’ancien président français François Hollande, dans le documentaire.