Et rebelote ! En moins de deux semaines, trois œuvres d’art ont été prises pour cible. Vendredi 14 octobre, relate Le Monde, les Tournesols de Van Gogh (par ailleurs protégés par une vitrine), à la National Gallery de Londres, ont été aspergés de soupe à la tomate. Dimanche 23 octobre, au musée Barberini de Potsdam, en Allemagne, Les Meules (elles aussi protégées par du verre), de Claude Monet, ont reçu de la purée de pommes de terre. Et, pas plus tard qu’hier, jeudi 27 octobre, ce fut au tour du tableau La Jeune Fille à la perle, de Johannes Vermeer, au musée Mauritshuis de La Haye (Pays-Bas), d’être sujet à un jet de substance inconnue, rapporte France Info, qui cite l’AFP. 

Cette fois-ci, deux des trois militants à l’origine de l’action se sont approchés de la célèbre œuvre d’art : l’un d’eux s’est collé le crâne au tableau. Sur leur t-shirt était écrit “Just Stop Oil”. Depuis début octobre, relate France Info, un collectif du même nom a lancé une série d’actions et de blocages quotidiens dans la capitale anglaise notamment (soupe sur le Van Gogh, peinture sur une concession Aston Martin, tarte sur la statue de cire du roi Charles III au musée Madame Tussauds). Le 14 octobre, l’une des deux militantes ayant aspergé le Van Gogh, a lancé : “Qu’est-ce qui vaut plus, l’art ou la vie ?” Ladite toile “vaut-elle plus que la nourriture ? Plus que la justice ? Êtes-vous plus préoccupé par la protection d’une peinture ou la protection de notre planète et de notre peuple ? La crise du coût de la vie fait partie de la crise du pétrole, le carburant est inabordable pour des millions de familles frigorifiées et affamées. Elles n’ont même pas les moyens de chauffer une boîte de soupe”, a-t-elle ajouté, citée par Le Monde

“Un spectacle”

Tous ces actes sont revendiqués par des militants du climat qui ont pour objectif d’attirer l’attention des médias, des politiques et du grand public. “Que vous l’aimiez ou non, notre action ‘soupe et Tournesols’ a suscité un débat à travers le monde entier. En combinant Warhol, Van Gogh et Mary Richardson, Phoebe et Anna [les deux militantes de cette action du 14 octobre] ont énervé des millions de personnes”, a commenté l’organisation “Just stop Oil” après ces actions. 

Ce qu’on peut entrevoir derrière ces actions, c’est un sentiment d’impuissance face aux désastres écologiques et à l’absence de dispositions réellement adaptées à la gravité de la situation”, explique la sociologue Anne Bessette, spécialiste du vandalisme sur les œuvres d’art, au micro de France Culture. Mais ce phénomène n’est pas nouveau. Le 29 mai dernier, un homme entartait La Joconde, de Léonard de Vinci, à Paris. “Pensez à la Terre. Il y a des gens qui sont en train de détruire la Terre. Pensez-y”, disait-il. “Ces gestes de destruction font l’objet d’un traitement médiatique immédiat sur des réseaux mondiaux de la communication visuelle. Il s’agit donc bien d’instrumentaliser la destruction des choses, œuvres et patrimoine, pour les faire entrer dans le champ de la communication et, par voie de conséquence, dans celui de la consommation visuelle d’une sorte de pornographie culturelle. La destruction est avant tout un spectacle”, expliquait la philosophe Marie-José Mondzain dans un article de la revue Études en 2016, citée par Le Monde

Sur France Culture, Anne Bessette rappelle qu’au début du XXe siècle, des œuvres d’art avaient été prises pour cible en Angleterre pour une autre cause : le droit de vote des femmes. Des actes liés au mouvement des suffragettes. Plus récemment, “il y a eu un cas en 1985, où une toile de Rubens a été incendiée par un jeune homme qui a expliqué avoir voulu protester contre la pollution de l’environnement et donc avait voulu s’attaquer à une œuvre d’art d’un grand maître pour secouer la population”, note la chercheuse associée au CERLIS, auprès de France Culture. En tout cas, après ces récents événements, la ministre française de la Culture, Rima Abdul Malak, a appelé les musées français à “redoubler de vigilance”.