L’Évangile fait partie des moteurs de leur engagement. « Accueillir des réfugiés, c’est aussi un acte de foi ! » résume Damaris Hege, secrétaire régionale grand est de la Fédération de l’entraide protestante (Fep). « La Cimade a été pour moi le lieu où j’ai trouvé une cohérence entre la quête de sens « au cœur de l’Évangile et de la défense des droits de l’homme« , l’action concrète, la réflexion sur l’engagement dans la cité et le travail en équipe (…) », écrit Geneviève Jacques, ancienne présidente de la Cimade, dans Les protestants 500 ans après la Réforme (Ed. Olivétan, 2017). L’histoire éclaire aussi cette mobilisation. Rappelons qu’au XVIIe siècle, les protestants, chassés de leur pays par l’édit de Nantes, étaient les migrants d’aujourd’hui. Comme le rappelle l’historienne Céline Borello dans un article paru dans le journal Réforme, l’exil huguenot vers les pays du Refuge fut massif. « Quelque 150 000 à 180 000 protestants formèrent un des plus vastes courants migratoires de la fin du XVIIe siècle. »
De La Cimade à la Fédération de l’entraide protestante
De nos jours, différents organismes protestants viennent en aide aux réfugiés du monde entier. Parmi eux figure la Cimade fondée en 1939 au sein des mouvements de jeunesse. Créée à l’origine pour accompagner « les évacués” de l’Alsace-Lorraine fuyant l’avancée nazie, la Cimade a su adapter ses actions au fil des enjeux sociétaux. Aujourd’hui, elle compte notamment 110 permanences situées en métropole comme en outre-mer visant à aider des personnes étrangères à obtenir un titre de séjour. Pour changer les regards sur les migrations, la Cimade mène de nombreuses actions de sensibilisation. Pour faire tomber les préjugés, elle organise chaque année dans plus de 100 villes de France le festival Migrant’scène. Au programme : des jeux, du théâtre, des projections, des débats, beaucoup d’engagement et de dynamisme… L’accueil de l’étranger est au cœur aussi des missions de la Fédération de l’entraide protestante (Fep) réunissant 360 associations et fondations. « Les étrangers sont une même face de nous-mêmes », souligne la Fédération sur son site Internet. Quel que soit leur statut, ils participent à la construction de notre pays, comme ils l’ont fait depuis des siècles. Ils doivent donc être accueillis avec fraternité, traités comme tels et accompagnés vers leurs espoirs de vie meilleure ».
Une mobilisation historique
Comme pour leurs frères catholiques, la mobilisation des protestants s’inscrit dans le temps. Pour rappel, 2010 a été décrétée « année des migrations » par la Conférence des Églises chrétiennes en Europe (KEK). En France, au cours de cette même année, catholiques, protestants et orthodoxes ont décidé de faire carême ensemble pour faire évoluer les droits des migrants.
En 2014, alors que les chrétiens d’Irak étaient menacés par les jihadistes du groupe État islamique, la Fédération protestante de France (FPF) prend position pour leur accueil. « Pour nous, il était clair qu’il fallait faciliter l’arrivée des réfugiés sans pour autant exfiltrer le christianisme d’Orient vers l’Occident » raconte François Clavairoly au journaliste Pierre Jova, dans Les chrétiens face aux migrants (Ed. Tallandier, 2019). Deux après, le 14 juillet 2016, jour de la fête nationale, à l’initiative de l’Église protestante unie de France, le collectif « Exilés : l’accueil d’abord ! » lance une campagne de sensibilisation. Des conférences de presse sont organisées, des centaines de paroisses affichent des bannières sur leur façade, des actions œcuméniques sont menées… Autre chantier majeur, depuis 2017, la FPF et la Fep participent au projet œcuménique et citoyen des Couloirs humanitaires. Ces corridors aériens permettent à des Syriens et des Irakiens vulnérables de rejoindre la France en toute sécurité, par avion, et d’être accompagnés jusqu’à leur intégration. Parmi les nombreuses actions menées ces dernières années, on peut citer encore le projet collaboratif de la plateforme des radios protestantes. Pour sensibiliser à la question migratoire, la plateforme a ainsi coproduit 50 émissions radio sur les migrations.
Pour sa part, le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) n’est pas en reste sur ces questions. En 2018, via une lettre, le Cnef a invité ses Églises affiliées et les œuvres membres à agir en faveur des « migrants stationnés au bord des côtes du Nord de la France », des « Syriens ou Irakiens accueillis par les autorités comme demandeurs d’asile » et à être attentifs aux pauvres. « Aujourd’hui, au lieu de crier notre peur d’un « grand remplacement », nous devrions nous réjouir de l’opportunité de renouveler notre compréhension de nous-mêmes, de notre culture, de notre histoire, de notre religion que nous permettent les migrations », résume pour finir Philippe Verseils, secrétaire-général de la Mission populaire évangélique.