L’interrogation peut sembler prétentieuse après 70 ans de vie œcuménique, d’autant plus qu’il s’agit de ce plus petit pays du Moyen-Orient en proie à de nombreuses tensions internes et régionales. Avec un système politique fondé sur un modus vivendi proportionnel aux dimensions de ses 18 communautés religieuses, chrétiennes et musulmanes avec leurs ramifications respectives.

Une observation socio-démographique permet de mieux situer notre postulat de départ. Au début des années 1800, le Mont Liban constituait l’habitat des chrétiens Maronites et des Druzes, ces montagnards qu’on opposait aux citadins de Beyrouth, capitale marchande et côtière, abritant les intellectuels et commerçants orthodoxes et sunnites. C’est à cette période que des missionnaires catholiques (plutôt français) et des missionnaires protestants (surtout américains) arrivaient au Liban dans un but d’évangélisation des populations musulmanes, plus particulièrement celles de Palestine ou des territoires dits bibliques. Les missions catholiques s’inséraient en milieu chrétien dans la montagne et en ville, parmi les Orthodoxes.

Quant aux protestants, d’abord américains puis européens, ils s’installaient dès 1823 en milieu majoritairement musulman comprenant une minorité orthodoxe bien enracinée. La prédication de la Parole, principal moyen de sensibilisation du public, se confrontait à un problème majeur: l’usage de la langue vernaculaire en opposition à la langue liturgique des églises locales traditionnelles : le grec, l’assyrien ou l’araméen. La lecture et la compréhension de la Parole de Dieu, éléments fondamentaux de cette nouvelle confession de foi, ont fortement œuvré en faveur de la généralisation de l’enseignement des garçons et, spécificité chrétienne, des filles. En leur qualité de futures mamans, c’est auprès d’elles que se ferait la transmission de la foi.

En 1975, Beyrouth Ouest comptait à elle seule 9 collèges et lycées d’inspiration ou de formation protestante et 12 entre Est et Ouest confondus, soutenus par 7 Églises ou congrégations locales. En même temps, la diffusion de la Bible et de la littérature religieuse, l’installation de sociétés bibliques, ont contribué à la diffusion de la Bonne Nouvelle et à la création d’un solide réseau œcuménique autour des Écritures.

Beyrouth fut aussi la « capitale » du véritable œcuménisme entre les quatre familles religieuses du Moyen Orient. Le CEMO (Conseil des Églises du Moyen-Orient ), fondé en 1974, fut largement initié et soutenu par son bras protestant et ceci tout au long de la guerre civile et des conflits régionaux. La présence du protestantisme au Moyen Orient – et plus particulièrement à Beyrouth – a certes laissé un cachet indélébile sur cette « terre de mission». Elle a facilité l’exposition des Libanais aux cultures et civilisations étrangères.

Nous souhaiterions que ces talents reçus en abondance soient investis au service du développement du pays, de la région, afin de continuer à soutenir les plus petits d’entre nos frères.