La résidence étudiante Paumier-Vernes, située dans le 14e arrondissement à Paris, est méconnue des protestants. Ils n’y pensent guère quand ils cherchent un hébergement pour leur progéniture qui s’exile à Paris pour ses études. C’est pourtant une bien vieille dame puisqu’elle fête son cent soixante-dixième anniversaire cette année.

Un quartier très populaire au XIXe siècle

Nous sommes en 1855, dans le hameau de Plaisance, rattaché à Vaugirard, l’une des communes enclavées entre le mur des Fermiers généraux et les fortifications qui ceinturent la capitale. Tapi à l’ombre de Montparnasse, dans un recoin oublié, l’endroit est isolé des quartiers populaires de la rive droite célébrés par Victor Hugo, Émile Zola et Eugène Sue. Ici, l’urbanisme est rudimentaire, les infrastructures à peine ébauchées. La voirie n’est qu’un entrelacs incohérent de ruelles parsemées d’égouts à ciel ouvert, de nids-de-poule et de pavés disjoints.

Bien sûr, il n’y a pas d’école ! Les humbles s’entassent dans des taudis aux toitures avachies, notamment la classe ouvrière parisienne dont la population triple entre 1800 et 1870 et se constitue en dehors de l’Église et du christianisme pratiquant. En 1871, ce hameau deviendra un bastion de communards…

Des réponses chrétiennes aux questions sociales

Le pasteur Henry Paumier (1821-1899) a trente-quatre ans. Fils d’un doyen de la Faculté de théologie de Montauban, il est rattaché à la paroisse de Pentemont et habite le faubourg Saint-Germain, un des refuges parisiens du luxe et de ses joies. Défenseur du rôle de l’Église dans la transformation sociale, il conçoit l’engagement en faveur des plus pauvres comme un témoignage essentiel de sa foi. Avec son épouse Françoise, il fonde à Plaisance une paroisse protestante, deux écoles ainsi qu’un orphelinat de jeunes filles. Le père de Madame est Charles Vernes, le sous-gouverneur de la Banque de France ; il abonde en libéralités en faveur de leur projet.

Au lendemain de la Commune, un contemporain de Paumier, Robert McAll, crée lui aussi des missions dans les quartiers ouvriers de Paris (dont la première mission populaire évangélique de France à Belleville). Suivront Tommy Fallot, Charles Gide et Élie Gounelle, soucieux à leur tour d’apporter une réponse chrétienne aux questions sociales. Quant à l’œuvre du couple Paumier-Vernes, un bel héritage demeure : la paroisse de Montparnasse-Plaisance ainsi qu’une fondation reconnue d’utilité publique.

Cette dernière gère les murs du complexe culturel L’Entrepôt, inauguré naguère par Frédéric Mitterrand, mais surtout cette charmante résidence étudiante, récemment réhabilitée, avec des salles d’étude et de détente, une cuisine commune équipée, un très agréable jardin et trente-sept chambres. Pierre Bayle, France Quéré, Delphine Seyrig, Rabaud Saint-Étienne, Christophe-Philippe Oberkampf, les frères Peugeot, Francis de Pressensé… toutes seront prochainement baptisées du nom d’une grande figure protestante.
Avis aux étudiants (et à leurs parents) !