Ramène ta science est une chronique proposée par les élèves de l’Ecole des Mines d’Alès.

Les statistiques, ces menteuses sincères : quand les chiffres racontent autre chose

Elles sont partout — dans les journaux, les débats politiques, les publicités. Les statistiques rythment notre quotidien et donnent une impression de vérité incontestable. Pourtant, derrière la neutralité des chiffres, se cachent souvent des interprétations trompeuses. Car si les statistiques ne mentent pas, elles peuvent facilement nous induire en erreur.

La moyenne, un indicateur souvent piégeux

Prenons un exemple simple : dans une entreprise de dix salariés, neuf touchent 1 500 € et le patron 15 000 €. La moyenne atteint alors 2 850 €. Sur le papier, cela semble honorable. En réalité, la majorité des employés ne gagne même pas la moitié de cette somme. C’est ce qu’on appelle l’effet de levier : une valeur extrême fausse la perception d’ensemble.

Pour mieux comprendre une situation, il faut souvent se tourner vers la médiane. Cet indicateur sépare une série statistique en deux : 50 % des individus sont au-dessus, 50 % en dessous. La médiane permet donc de mieux représenter la réalité sociale.

L’écart-type, ou comment mesurer la dispersion

Autre concept clé : l’écart-type, qui évalue la dispersion des données autour de la moyenne. Prenons deux classes : dans la première, un élève a 20/20 et l’autre 0/20 ; dans la seconde, les deux ont 10/20. La moyenne est identique (10), mais l’écart-type révèle une inégalité forte dans la première classe et une homogénéité dans la seconde.

Les biais, ces ennemis invisibles de la rigueur scientifique

Les erreurs d’interprétation ne viennent pas toujours des calculs, mais de biais de sélection. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les ingénieurs américains voulaient renforcer les avions aux endroits les plus endommagés. Le statisticien Abraham Wald fit remarquer qu’ils n’analysaient que les avions revenus, pas ceux abattus. Il fallait donc renforcer les zones intactes — celles où les impacts auraient été fatals. Une leçon d’humilité statistique.

Autre piège célèbre : le biais du survivant. Le slogan « 100 % des gagnants ont tenté leur chance » est mathématiquement vrai, mais il occulte les millions de perdants.

Lire les chiffres, c’est lire des histoires

Les statistiques ne sont pas mensongères — elles demandent simplement de l’esprit critique. Derrière chaque chiffre, il y a une histoire, un contexte et des choix d’interprétation. Comprendre la différence entre moyenne, médiane, biais et dispersion, c’est apprendre à voir au-delà des apparences chiffrées.