L’entraide est-elle inscrite dans l’ADN de la FEP ?

JF : Par entraide, il nous faut d’une part entendre « entre-aide » entre associations, c’est-à-dire la possibilité, au sein d’une fédération dont les membres sont fraternels et bienveillants les uns envers les autres, de s’entraider, quand par exemple une importante fondation intervient auprès d’une plus petite association pour la soutenir sur des questions juridiques, de financement, ou autres. La FEP propose cet espace où s’entraider et s’écouter entre associations, avec bienveillance, est possible.

D’autre part, il faut également entendre le mot de façon plus large, appelant à une entraide humaine, fraternelle, universelle, où les sachants, les possédants, sont appelés à aider leurs frères humains les plus précaires et démunis. Ce double sens nourrit l’engagement des membres, au sein de la FEP.

IR : Nous souhaitons en effet encourager l’entraide entre nos membres, une entraide qui se nourrit de leur pluralité, et susciter des réflexions et expérimentations sur le sens de leur action. Nous offrons un espace « communautaire » dans un réseau structuré, propice à un dialogue en confiance, une coopération efficace, une gouvernance plurielle.

À côté de cet ancrage de terrain, la FEP revendique un ancrage spirituel et éthique protestant. Elle participe – collectivement, avec ses membres – à la construction d’une société plus juste et plus fraternelle, inspirée par le message de l’Évangile. La FEP est un solide pilier du protestantisme : elle fait le lien entre ce que l’on vit et ce que l’on croit, elle met la foi en action.

Notre engagement est responsable, bienveillant, innovant, collaboratif, mais il demeure humble et réaliste, au service d’un projet qui nous dépasse.

Quelles sont les principales missions de la FEP ?

IR : Notre première mission est de fédérer et d’animer. Nous animons un réseau organisé en régions et proposons des événements, rencontres, lieux d’échanges, mutualisations des pratiques… mais nous offrons également un support au développement et à l’action des associations membres : communication, ressources humaines et financières, méthodes, formations, outils et moyens de financement…

Notre deuxième mission est d’écouter et d’agir. Nous faisons circuler les données et expériences de terrain et décryptons les évolutions sociétales pour prévenir, innover, expérimenter et faire des propositions constructives. Nous coproduisons aussi des études, observations, analyses de fond en partenariat avec des experts. Enfin, nous concevons des projets de terrain et en organisons la mise en œuvre : il peut s’agir de projets d’ordre social, mais aussi culturel, économique, professionnel, politique…

JF : Notre troisième mission est de représenter et d’interpeller : représenter les membres dans les instances et institutions nationales, locales et européennes, et porter un plaidoyer politique et sociétal en concertation avec la Fédération protestante de France, dont la FEP est membre, et d’autres partenaires de la société civile engagés dans l’action sociale.

Nous portons la parole de nos membres et formulons des propositions auprès des instances et pouvoirs publics, nous prenons part au débat, participons à des groupes de travail thématiques et mettons en place des partenariats institutionnels.

La FEP est un partenaire de référence sur les sujets que l’on peut appeler d’«action sociale », reconnue pour sa capacité à être indépendante, rigoureuse, ouverte à la modernité, inventive, audacieuse. Elle offre un autre regard sur l’engagement social-chrétien en essayant d’embrasser le monde dans toute sa complexité et d’associer le plus grand nombre à sa démarche, dans un esprit de compromis.

Pouvez-vous nous citer quelques réalisations et actions majeures de la FEP ?

JF : Je pense spontanément aux nombreux plaidoyers dont les « 95 thèses sociales » élaborées en 2017 pour le 500e anniversaire de la Réforme ; la FEP a produit une proposition politique de quatre-vingt-quinze nouveaux sujets sociaux à traiter, pour les… cinq cents ans à venir !

Je pourrais aussi citer la construction d’un « projet fédératif », avec une plateforme d’action et de positionnement, ou encore nos prises de position pour la défense du modèle associatif, de la liberté d’action sociale, d’un partenariat public-privé et associations-pouvoirs publics, du principe de laïcité et de l’expression de la spiritualité dans l’espace public.

IR : Nous engageons également des actions spécifiques. Notre programme Accueil de l’étranger met en œuvre les Couloirs humanitaires depuis les camps de réfugiés du Liban, a développé une expertise dans le domaine de l’hébergement citoyen, lutte pour l’accès au travail des personnes sans-papiers, la prise en charge spécifique des mineurs non accompagnés, l’accès aux soins et à l’hébergement, la suppression du délit de solidarité ; il promeut la construction d’une politique européenne respectueuse du droit des êtres humains.

Nous offrons également des espaces d’expérimentation à nos membres, par exemple pour favoriser la démocratie participative et la prise en compte de la parole des personnes accueillies, afin qu’elles soient associées à la construction de leur parcours, et ce, jusqu’au bout de la vie. Nous travaillons également sur la synergie entre bénévoles et professionnels, une dynamique fructueuse qui est à l’œuvre chez une majorité de nos adhérents et qui demande à être pensée, coordonnée, accompagnée. Nous encourageons et facilitons les mutualisations et projets collaboratifs ou transversaux. Nous organisons des événements, colloques, ou rencontres permettant de croiser les regards sur des thématiques particulières et de questionner l’éthique et le sens de l’action, pour que chaque personne soit considérée dans la globalité de ses besoins : physiques, psychiques et spirituels.

JF : Nous attirons aussi l’attention, inlassablement, sur les publics oubliés ou laissés de côté : les personnes vieillissantes à la rue, les Roms et les Tziganes, les mineurs isolés, les grands exclus en souffrance psychique, les personnes handicapées vieillissantes… À la FEP, nous refusons la fatalité et proclamons que tout être humain a droit à une place juste et digne, quelle que soit sa situation de souffrance ou de vulnérabilité. Notre rôle est d’unir les efforts de nos membres pour construire une société plus fraternelle et proclamer l’espérance.