Son parcours est ordinaire, conforme à la tradition protestante : de catéchumène, Catherine Banzet devient monitrice d’école du dimanche puis responsable de jeunesse et cheftaine d’éclaireuses. La suite l’est moins : en 1962, la jeune femme fait une retraite à Reuilly et y reçoit confirmation de son appel. Elle est, à l’époque, infirmière à l’hôpital de Nancy et mène joyeuse vie, même si elle sait qu’autre chose l’attend. Entre le mariage et une existence consacrée au service de Dieu, elle choisit sa voie : « Dieu avait mis sa main sur moi. » Mais sa mère décède et elle ne rejoindra la communauté des diaconesses qu’en 1965.
Postulat, noviciat, consécration, celle qui est désormais sœur Nathanaëlle déroule sa nouvelle vie. Elle est infirmière à l’hôpital des Diaconesses, à Reuilly. Bientôt, on lui propose l’École de cadres et l’enseignement. Celle qui s’était promis de ne jamais enseigner se retrouve devant des élèves infirmières et se passionne pour la transmission. « C’est le fruit de l’obéissance. Répondre à un appel nous fait découvrir nos ressources. Malheureux sont les gens à qui on ne demande jamais rien ! »
Douze ans et un congé sabbatique – en Égypte – plus tard, sœur Nathanaëlle accepte un remplacement de trois mois à Claire Demeure1 , où elle découvre la vieillesse « dans ce qui fait dire aux gens : “Je ne veux pas vieillir.” » Elle y restera vingt et un ans. L’infirmière devient surveillante générale et forme, avec le directeur et le médecin chef de service, un trio singulier. Dans le même temps, elle s’engage avec l’Entraide protestante2 . Nous sommes en 1985, les soins palliatifs se développent en France. Les soignants de Claire Demeure ont le profil : « On avait en nous, dans la manière de soigner, d’accueillir les familles, d’accompagner les gens, les soubassements du mouvement des soins palliatifs. » Les trois vont se former en Suisse. Claire Demeure s’agrandit et devient une des premières unités de soins palliatifs de France. Très vite, des malades atteints du sida affluent. Avec les équipes de soins, sœur Nathanaëlle accompagne des jeunes gens en fin de vie, portée par cette parole du Christ : « Voici, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde3 . » Elle s’engage dans le Mouvement des soins palliatifs, puis participe à la création de l’association Rivage4 et compose avec un étonnant panachage de bénévoles.
Lorsque sœur Nathanaëlle rejoint la direction générale de l’Association des œuvres et institutions des Diaconesses de Reuilly, c’est pour transmettre aux soignants son expérience en gériatrie et bénévolat d’accompagnement. À partir de 2008, elle visite tous les ans la communauté des sœurs de Bafut, au Cameroun.
Aujourd’hui, sœur Nathanaëlle fait ce pour quoi elle est entrée dans la communauté : être présente à Dieu dans une vie fraternelle à plein temps. « Je ne regrette rien de ces années d’intense activité. C’est un privilège d’avoir pu transmettre, rencontrer des personnes remarquables et partager la Vie. C’est la manière de suivre le Christ qui m’a été donnée. »
Sœur Nathanaëlle suit de près les débats brûlants sur la fin de vie. « Je suis vieille mais je n’ai pas perdu ma capacité d’indignation. » Pour la sœur, l’essence du soin est la présence et l’écoute. « Personnellement, je crois qu’un lieu de soins n’est pas un lieu où on “tue” les malades »
1 Établissement gériatrique des Diaconesses.
2 L’Entraide Protestante deviendra Fédération de l’Entraide Protestante en 1992.
3 Évangile de Matthieu, 28.20.
4 L’association Rivage regroupe des bénévoles d’horizons différents se reconnaissant une sensibilité commune face à la souffrance physique, psychologique et spirituelle de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale.