En passant par l’isoloir, les électeurs sont-ils influencés par leur appartenance religieuse ? Lors des élections présidentielles françaises, une majorité de catholiques a soutenu Nicolas Sarkozy en 2012 puis François Fillon en 2017. Chez les électeurs de confession juive, le cœur balance également à droite. En 2007 et 2012, ils avaient majoritairement plébiscité Nicolas Sarkozy.

Et les protestants, qui soutiennent-ils ? Selon les études du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), s’ils votent traditionnellement plutôt au centre, il semble qu’ils penchent un peu plus à droite au fil du temps.

« Il faut toutefois se montrer très prudent avec ces catégories », tempère Claude Dargent, professeur de sociologie des opinions à l’Université de Paris 8. Pour le chercheur, des notions comme celle de « vote de classe » ou « vote religieux » sont trop rigides et peu opératoires. Il s’agit de prendre en compte la complexité des différents courants au sein d’une même confession ainsi que la dimension socio-professionnelle des électeurs. Une subtile alchimie. A titre d’exemple, on peut se demander si le vote des musulmans, très marqué à gauche, est vraiment confessant ou s’il correspond plutôt au statut d’une majorité des votants issus de couches de la population qui votent traditionnellement à gauche.

En sociologie, on a longtemps avancé l’idée d’un vote des protestants à gauche qui se serait estompé au cours du XXe siècle. « Les récentes élections confirment cette tendance : les protestants votent de plus en plus à droite », analyse Claude Dargent en s’appuyant sur les recherches du CEVIPOF. Pour expliquer ce phénomène, le sociologue pointe notamment la forte poussée de la composante évangélique, plus conservatrice que les reformés sur les questions de société. Or le dernier quinquennat a été marqué par des sujets clivants : « L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe a cristallisé les positions confessionnelles » et certains protestants se sont certainement retrouvés autour des valeurs catholiques de François Fillon. Dans l’entre-deux tours, des positions assez fermes ont été rappelées par la Fédération protestante de France. Son président, François Clavairoly, a signé une tribune appelant à voter Emmanuel Macron au côté du grand rabbin de France Haïm Korsia et Anouar Kbibech, président du Conseil Français du Culte Musulman, afin de faire barrage au Front national. Il s’agissait de faire triompher par la voix des urnes une France « généreuse, tolérante et ouverte sur le monde ». Les fidèles ont visiblement suivi.

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Edition Genève du mois de Juin 2017