Avoir des statistiques genrées, qui distinguent les femmes des hommes, est une demande historique des associations féministes. Le rapport remis en juillet 2017 par le Haut-Conseil à l’égalité à la Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, sur la santé des femmes précaires est un triste exemple de la pertinence de telles études.

Le rapport montre que les femmes représentent 64 % des personnes qui reportent des soins ou y renoncent, soit près de 9,5 millions de femmes chaque année. Ainsi, 52,5 % des femmes ne disposant pas d’une complémentaire santé n’ont pas réalisé de dépistage du cancer de l’utérus, contre 25,1 % de celles qui ont une assurance. Ce chiffre explose à 68,52 % chez les femmes qui gagnent moins de 2000 euros par an.

Plus malades, plus mal soignées

Le problème est également important du côté de la santé psychologique. 21 % des femmes – trois fois plus que les hommes – sont concernées par les troubles anxieux (états de stress post-traumatiques, anxiété généralisée et trouble de l’adaptation). Ce chiffre est de 35 % chez les femmes sans-domicile-fixe et les cheffes de familles monoparentales. Au travail, les maladies professionnelles ont connu une hausse de 155 % pour les femmes entre 2000 et 2015. Le taux de fréquence des troubles musculo-squelettiques chez les ouvrières est de 8,4 pour un million d’heures salariées, contre 2,4 chez les ouvriers. Pourtant, ces conditions de travail usantes sont insuffisamment reconnues : les trois-quarts des personnes qui ont cumulé au moins un point sur leur compte prévention pénibilité sont… des hommes.

Quand elles se soignent, elles font face à l’androcentrisme (l’homme au centre) de la médecine. Par exemple pour les maladies cardio-vasculaires, 43 % des accidents sont fatals chez les hommes et 55 % chez les femmes. En cause : une prise en charge plus tardive car les symptômes spécifiques aux femmes sont moins connus des professionnels de santé. La mortalité en la matière est multipliée par trois pour les catégories socio-professionnelles les plus défavorisées.

Agir

Le Haut-Conseil à l’égalité appelle à une politique volontariste de lutte contre les inégalités de santé qui tienne compte des inégalités de sexe. Il propose une meilleure évaluation dans le compte prévention pénibilité du caractère usant et pénible des postes majoritairement occupés par les femmes en situation de précarité, une simplification de l’accès aux prestations sociales, la mise en place d’un accompagnement pour faciliter les démarches et une meilleure formation des professionnels de santé à l’accueil des personnes en situation de précarité, au dépistage systématique des violences dans le cadre professionnel et aux symptômes spécifiques aux femmes pour certaines pathologies, cardiaques par exemple.