Par Catherine Barrière, anthropologue, fondatrice et coordinatrice de l’association PACIM* de Montpellier

Face à la difficulté d’établir des liens de voisinage sur le quartier de la Mosson et également face au constat de personnes âgées en situation d’isolement, PACIM a posé comme hypothèse que le numérique pouvait être un médiateur pour réactiver du lien social. Elle a créé avec des habitants et acteurs associatifs du quartier la plateforme d’entraide numérique « generations-solidaires-mosson.fr » active depuis juin 2015. Hacké (piraté) au printemps, ce site d’entraide est en train de renaître sous forme d’application.

L’informatique contre l’isolement

Au cours de nos actions de communication autour de cette plateforme, nous avons pu remarquer une certaine diabolisation du numérique par les aînés du quartier et une réelle réticence pour investir les nouveaux outils issus du numérique. De plus, alors même que les échanges intergénérationnels sont limités sur le quartier, avec des représentations négatives de la jeunesse vis-à-vis des plus anciens et vice versa, le projet vise également à un rapprochement des générations par la création de liens d’entraide au sein du quartier, notamment autour des nouvelles technologies, dans l’objectif de réduire la fracture numérique et de résorber la distance relationnelle qui se creuse entre les générations, au moyen de l’entraide, du téléphone solidaire, du coaching numérique intergénérationnel et également de temps de partage. Cette action participative de solidarité permet à chaque génération de jouer un rôle moteur et tend à estomper les cloisonnements socio-culturels.

Relationnel et autonomie

En 2020, PACIM propose dix ateliers numériques d’une heure par semaine, dédiés à des publics francophones, arabophones et berbérophones. Adaptés aux capacités des participants, nos ateliers numériques sont devenus un vrai rendez-vous pour nos adhérents qui deviennent progressivement autonomes. Certaines adhérentes qui avaient l’habitude de laisser leur conjoint ou les enfants gérer se ressaisissent du droit de regard sur leur situation financière et se réinvestissent sur ces responsabilités familiales. C’est un changement très positif que nous voulons faire essaimer afin de développer le pouvoir d’agir de chacun et de renforcer l’égalité hommes-femmes.

Confinement

Pendant la période de confinement liée à la Covid-19, l’équipe s’est fortement mobilisée pour soutenir, accompagner et aider les adhérents et les habitants du quartier de la Mosson. Afin de rester en lien et de faciliter la communication avec eux, nous avons retransmis nos coordonnées téléphoniques et email à tous nos publics et avons créé un groupe WhatsApp.

Nous avons mesuré à quel point les seniors et les publics fragiles en difficulté avec internet subissaient une forme de double peine puisqu’ils ne trouvaient aucun guichet pour répondre à leurs demandes et qu’ils n’étaient pas en mesure de se débrouiller seuls. Certaines personnes totalement isolées étaient en panique… et craignaient de perdre certains droits. Afin de leur permettre de gérer leurs problèmes et de conserver leurs droits, nous avons mis en place une permanence numérique en présentiel et à distance et avons pu soutenir plus d’une centaine de personnes. Nous avons également chargé Odette, notre sophrologue, de préparer des capsules de détente de 10-15 minutes qui ont circulé sur WhatsApp et sur notre site internet, afin de prolonger à distance les bienfaits des ateliers de sophrologie.

  • L’association PACIM (Passeurs de cultures, passeurs d’images) est implantée depuis 14 ans dans le quartier de la Mosson à Montpellier, où elle mène différents projets axés sur la solidarité intergénérationnelle et le rapprochement interculturel.
    http://paciminterculturel.asso.fr/