En février 2019, nous organisions un débat à la Maison Ouverte avec Jocelyne Porcher, sociologue à l’INRA, et Yves-Pierre Malbec, éleveur de brebis dans le Lot et responsable du groupe « Abattoirs » à la Confédération paysanne (la Conf ’). Dans la salle, un représentant du Parti animaliste. Nous pensions naïvement que tout le monde serait d’accord dans la dénonciation de l’industrie agro-alimentaire et pour le respect des animaux. Eh bien pas du tout. Ça se chicote même sévère.

Du côté des végétariens du Parti animaliste, on reproche à Jocelyne Porcher et aux éleveurs de la Confédération paysanne de ne pas laisser les animaux en liberté, de finir par les tuer (dans des abattoirs où ça se passe mal) et les manger. L’élevage est une domination humaine sur l’animal qui reste dans le spécisme, la supériorité d’une espèce sur une autre.

La riposte n’est pas plus tendre. Les végétariens sont accusés de ne pas vouloir qu’animaux et humains vivent ensemble – ce que serait l’élevage – et même se séparent complètement. Ils seraient financés – l’accusation a été portée sans preuve sérieuse contre l’association L214 – par des industriels qui rêvent de développer la viande artificielle.

Un conflit assez proche oppose les défenseurs de l’ours ou du loup et les éleveurs de moutons. Ou la Conf ’ à l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) qui achète des hectares pour en faire des réserves de vie sauvage, laissés en libre évolution, sans aucune présence humaine, et donc pas de paysans…

Une des questions de fond de ce débat est : avec qui et comment faisons-nous communauté si nous pensons que la conversion écologique c’est aussi l’élargissement de la communauté humaine aux non-humains (flore, faune, sols) ? Peut-on faire communauté avec des êtres qu’on domestique et mange ? Peut-on faire communauté avec les animaux si on n’en fréquente aucun ?