La mort est là pour le rappeler. Les héritiers de la personne décédée ne portent-ils pas en majorité, du moins en France, le fameux nom de famille ? L’affaire Johnny Hallyday, avec ses controverses, est un exemple parmi tant d’autres !

Lourd ou léger à porter selon les familles, les périodes et les événements, le nom demeure un héritage. Léger comme le soulignait cette enseignante lors d’une médiation concernant un enfant en difficulté : « N’ayons pas de crainte pour lui, avec le nom qu’il porte, il s’en sortira toujours ! »

Mais au contraire, un nom lourd à porter pour ces enfants dont le père est mis en prison. Ou pour cet homme au chômage malgré des compétences reconnues mais porteur d’un nom venu d’un « ailleurs » provoquant le rejet. L’Histoire peut témoigner de ce rejet d’un nom. Il y a soixante-dix ans, les personnes porteuses d’un nom juif étaient conduites en camp de concentration, puis vers la mort. Un rejet, savamment, tragiquement organisé, aujourd’hui disparu. Quid des soubresauts vis-à-vis des personnes venues d’un horizon déconsidéré ?

Le poids du nom peut nous empêcher d’être ce à quoi nous aspirons, ce que nous voulons devenir, fonder, transmettre. Il n’y a encore pas si longtemps, la bâtardise était considérée comme une tache, une souillure, une marque indélébile, une « naissance gauchère ». Les mal-nés – vulgairement appelés les bâtards -, se voyaient d’emblée rejetés.

« Le poids du nom peut nous empêcher d’être ce à quoi nous aspirons, ce que nous voulons devenir, fonder, transmettre. »

La société a évolué. À partir des années 80 et la remise en cause du mariage comme seule possibilité de s’unir, le fait d’être mal né fut peu à peu dédramatisé. Cependant, si le rejet dû à une « naissance gauchère » a disparu, l’exclusion par contre, due à des différences jugées insupportables, demeure. Au point de s’avérer souvent éliminatoire.

Hériter d’un nom est pourtant un fait magnifique, à l’image de la locution latine : « Nomen est omen ! » Le nom est un signe. Il nous donne une identité. Il nous permet d’être reconnu. Il fait surgir en nous la sève des racines profondes qui nous solidifient. Des racines d’aujourd’hui, mais surtout d’hier, parfois même ancestrales.

« Devenir humain, c’est se savoir appelé par son nom, et être ainsi un sujet unique ! », écrivait très justement le pasteur et journaliste Antoine Nouis. Bel héritage !

  • Petite chronologie du patronyme héréditaire

Porter un nom de famille accolé au prénom est une évidence aujourd’hui. Pourtant, au Moyen-Age, les Français portaient un nom de baptême (prénom), qui ne se transmettait pas de génération en génération. Ces noms de baptême servaient souvent à caractériser la personne – sa taille, son métier… Le patronyme ne devient héréditaire qu’à partir du VIe siècle. En rendant obligatoire l’inscription des noms/surnoms dans l’état civil, François Ier scella les patronymes, qui ne pouvaient plus changer après l’inscription sur le registre. Par la suite, l’immuabilité du nom est actée en 1794 par la loi du 6 fructidor an II : aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance.

Chantal Deschamps