À l’heure de la détente des grandes vacances et des bains de soleil, et donc de lire Présence sur la plage, tentons de revenir rapidement sur la question épineuse du travail (quel meilleur moment que le farniente pour cela).

Le protestantisme a sans doute beaucoup à se faire pardonner sur la question du travail. On peut certainement avancer que le travail comme notion et comme concept, séparés par conséquent du reste des activités humaines, apparaît avec la modernité. Esclavage et servage relevaient d’une toute autre organisation des rapports humains, où c’est la personne humaine qui était directement propriété du maître. Avec le capitalisme, et la modernité, c’est le travail qui devient directement le lieu de la domination et de la négociation. Nous entrons dans une société contractuelle. Un progrès ? Incontestablement, dans une certaine mesure ! Et progrès où les protestants ont joué un rôle moteur.

Du capitalisme au socialisme ?

Le nom de Max Weber vient tout naturellement à l’esprit, c’est le cas de le dire, lui qui lie L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, dans son célèbre livre. Mais très vite, et c’est là peut-être une loi de l’histoire humaine, la société capitaliste et contractuelle se révèle aussi une société de l’exploitation et de la brutalité. Le travail est exploité au profit d’une minorité. Apparaissent alors les premières formes de résistance du monde du travail que sont les syndicats et le mouvement ouvrier. Le système capitaliste doit être analysé et combattu et les grandes théories socialistes et anarchistes font florès. Et chez les chrétiens, et en ce qui nous concerne chez les protestants, naissent le christianisme social ou le socialisme chrétien. Souvent confus, armés seulement de leur révolte contre l’injustice sociale, nous leur devons tout de même les fondements de ce qui nous anime encore.

Une idolâtrie ?

La fidélité à cette histoire nous oblige à penser encore plus avant. La description weberienne est-elle totalement véridique ou est-elle en partie liée à son époque ? La réponse ne peut qu’être nuancée. La glorification du travail et du profit que l’on peut en tirer est bien présente dans les théologies de la prospérité et les sinistres pouvoirs qu’elle soutient. L’exemple du Brésil, à ce titre, fait froid dans le dos. Mais ces courants, c’est l’hypothèse que nous proposons, ne sont-ils pas l’expression d’une forme d’idolâtrie, celle de la réussite sociale et de l’argent-roi. Cette tentation, sans l’ombre d’un doute présente dans le protestantisme dès ses origines, ne peut le résumer.
Car, par la grâce, nous sommes appelés à nous défaire de toutes les idoles. Participer aux combats des humains pour une activité sociale librement consentie et partagée en fait partie. Ces quelques lignes ne sont que le début d’une réflexion qui doit continuer.