Le monde a changé radicalement depuis l’irruption de la pandémie de Covid-19, marquant la vulnérabilité palpable des corps vivants et de la nature elle-même. Il y a cinq ans, le philosophe Olivier Abel était interrogé sur la pandémie. Aujourd’hui, les médias reviennent sur ces cinq années écoulées, questionnant ce que nous avons appris et les changements survenus, notamment le fameux « monde d’après » qui semble rester une énigme.

La pandémie a remis en question notre rapport à la mort, à la solidarité, et a souligné l’importance des métiers essentiels. Chaque soir, les décomptes des morts étaient annoncés, instaurant une familiarité quotidienne avec la mort. Cela a également entraîné une valorisation des gestes de solidarité, comme les applaudissements pour le personnel soignant, et a rehaussé l’importance des professions du médical, désormais vues comme essentielles.

Le confinement a eu des répercussions profondes, allant des dépressions à des ruptures conjugales, exacerbant la distanciation sociale et la dissociation. La crise a engendré une prise de conscience sur l’importance des contacts humains et des interactions physiques, tout en accélérant l’utilisation de technologies permettant de maintenir les liens à distance, comme les visioconférences et le télétravail.

Un retour accru à la vie locale et à la nature a été observé, avec des personnes cherchant à s’éloigner des grandes villes pour des cadres de vie plus apaisants et connectés à la nature. Cette réévaluation du cadre de vie et de la proximité a peut-être posé les bases d’une transformation sociale et professionnelle durable.

Cependant, la pandémie a aussi exposé et renforcé des vulnérabilités existantes. Le concept de « biopouvoir » a pris de l’ampleur, illustrant comment les sociétés ont utilisé la surveillance et le contrôle pour gérer la santé publique, parfois de manière oppressive. L’acceptation des restrictions et des vaccins est devenue un sujet clivant, menant à des divisions sociales et à un scepticisme croissant envers la science et le consensus médical.

Les impacts économiques sont également significatifs, avec des questionnements sur la mondialisation et le capitalisme. Le débat sur l’isolationnisme et la mondialisation est devenu plus pertinent, suggérant la nécessité d’un équilibre entre ouverture et protection des économies locales.

Enfin, la crise a touché la sphère spirituelle, remettant en question nos valeurs et notre rapport au matérialisme. Elle a renforcé la nécessité de se recentrer sur des valeurs plus humaines et communautaires, de se reconnecter à ceux qui nous entourent et de repenser notre engagement envers le progrès et la justice sociale. Cette épreuve collective a peut-être, malgré tout, ouvert la voie à un avenir où la solidarité et la résilience seront au cœur des sociétés réinventées.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Olivier Abel
Entretien mené par Jean-Luc Mouton
Technique : Quentin Sondag

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