Emil Cioran a dit : « À la moindre contrariété et, à plus forte raison, au moindre chagrin, il faut se précipiter au cimetière le plus proche, dispensateur soudain d’un calme qu’on chercherait vainement ailleurs. » À ne jamais fréquenter les cimetières, nous prenons le risque de nous croire immortels, de vivre à la surface de nous-mêmes, alors que c’est dans l’essentiel que se trouvent les vrais enjeux de notre existence.

Heidegger a défini l’humain comme un être pour la mort. Il voulait dire qu’une existence qui est sur le mode de l’authenticité se doit d’avoir intégré sa propre mortalité. On raconte que le pape Innocent IX avait commandé un tableau qui le représentait sur son lit de mort et qu’il le contemplait chaque fois qu’il avait à prendre une décision importante. Cette pratique s’inscrit dans la tradition de la meditatio mortis – méditation de la mort – exercice qui consiste à penser à sa propre mort pour aider à prendre conscience de la valeur du temps, et pour injecter de l’ultime dans son quotidien. C’est bien ce que disait Paul lorsqu’il écrivait : « Vous savez en quel temps nous sommes : c’est bien l’heure de vous réveiller du sommeil, car maintenant le salut est plus proche de nous que lorsque nous sommes venus à la foi. » (Rm 13,11). […]