Nathalie Heinich, dans son dernier livre Le Wokisme : un totalitarisme? publié chez Albin Michel, critique le mouvement dit « woke », un ensemble d’idéologies visant à lutter contre les discriminations mais qui, selon elle, a évolué vers quelque chose de problématique. Alors qu’à l’origine il s’agissait de défendre les droits des femmes, des personnes de couleur, des personnes LGBTQ+ et d’autres, Nathalie Heinich affirme que ce mouvement, sous la bannière du « wokisme », s’est éloigné de ses racines progressistes et constitue désormais une véritable menace pour les valeurs fondamentales de la gauche.

Nathalie Heinich souligne une distinction majeure entre les interprétations américaine et française du wokisme, les premiers adoptant le terme « wokisme », tandis qu’en France, il est largement rejeté. Le mouvement, selon Nathalie Heinich, est centré sur une forme de politique identitaire très clivante. Il assigne les individus à des communautés en fonction de leur race, de leur sexe ou de leur orientation sexuelle, au lieu d’adopter une approche universaliste qui reconnaît les individus en tant que citoyens avant tout. Cette mentalité « communautaire », affirme-t-elle, contraste fortement avec le modèle français d’universalisme, qui est depuis longtemps une valeur fondamentale de la gauche.

En outre, Nathalie Heinich critique l’obsession wokiste de la domination, suggérant que tout est vu à travers le prisme de la dynamique du pouvoir, où les individus sont soit des dominants, soit des dominés. Cette perspective, affirme-t-elle, réduit les questions sociales complexes à une vision binaire simplifiée à l’extrême et ne tient pas compte des nuances de l’expérience humaine. Ce faisant, elle restreint la recherche intellectuelle et nuit à la quête du savoir, car elle favorise la rigidité idéologique au détriment du débat ouvert et de l’exploration scientifique.

Enfin, Nathalie Heinich s’inquiète de l’érosion de la liberté d’expression au sein du wokisme. Selon elle, le mouvement tente de faire taire les voix qui ne se conforment pas à son idéologie, ce qui a pour effet de refroidir l’expression culturelle et universitaire. Elle compare cela au contrôle stalinien de la pensée et prévient que de telles pratiques menacent les principes fondamentaux de la gauche, tels que la liberté d’expression et le discours rationnel.

Dans son livre, Nathalie Heinich invite à reconsidérer le wokisme et à prendre conscience de ses effets néfastes sur la société.

Production Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Nathalie Heinich
Entretien mené par : David Gonzalez
Technique : Quentin Sondag