13.11.2022 : Luc 21.5-19 – Apocalypse de Luc

La résistance dans les tragédies de l’histoire

Introduction

La séquence qui précède notre passage évoque une pauvre veuve qui met tout ce qu’elle a pour vivre dans la caisse du temple pour l’entretien du bâtiment, pourtant ce dernier va être détruit. Ce chapitre évoque la vanité des constructions humaines dont nous sommes si fiers.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

L’annonce de la destruction du temple

Les exégètes s’appuient sur ce passage pour dire que l’évangile de Luc a forcément été écrit après 70, date de la destruction du temple. Peut-être que la rédaction est tardive, mais cet argument est faible. Il n’est pas très difficile au temps de Jésus de prévoir qu’un système religieux qui pille les veuves pour entretenir un bâtiment et une caste de prêtres qui se pavanent dans de longues robes et qui aiment être salués court à sa perte.

En hébreu, le mot prophète vient d’un verbe qui signifie venir ; le prophète est celui qui voit ce qui vient. Jésus voit que le temple ne peut tenir dans la durée.

Le tragique de l’histoire

Nation se dressera contre nation et royaume contre royaume, il y aura de grands tremblements de terre et, dans divers lieux, des pestes et des famines. Pas besoin de chercher bien loin pour se demander quand cela arrivera, il suffit d’ouvrir le journal.  Depuis que Jésus a parlé toutes les époques ont été marquées par les guerres, les tremblements de terre, les épidémies et les famines.  

Parfois on entend dire : Si Dieu existe, pourquoi les guerres, les tremblements de terre, les pestes et les famines ? La réponse de l’évangile est que l’histoire est marquée par les tragédies et que Jésus les a annoncées.

Pistes d’actualisation

1er thème : ne vous laissez pas égarer

Les temps de crises ont souvent été marqués par l’émergence de discours religieux qui cherchent à entraîner les humains dans des illusions messianiques.

Nous en trouvons une illustration dans l’actualité avec les discours religieux qui dans les deux Amériques encouragent les politiques les plus identitaires, démagogiques, antisociales et finalement idolâtres.

C’est pourquoi Jésus alerte ses disciples, plusieurs prétendront parler en son nom, mais ils ne doivent pas se laisser égarer. Plus la situation est exceptionnelle plus nous sommes appelés à la fidélité la plus commune. Quand le monde s’effondre, il faut rester fidèle à ses fondations : la famille, l’Église, la solidarité, le voisinage, le travail quotidien.

2e thème : Cela vous amènera à porter témoignage

Une des grandes leçons de l’histoire est qu’il est vain de combattre une idée en persécutant ceux qui la portent. On peut tuer un humain, il est plus difficile de tuer une idée. Tertullien a écrit que le sang des martyrs était une semence de chrétiens. Dans l’histoire, la persécution a souvent renforcé l’Église au lieu de la détruire.

Jésus a prédit à ses disciples qu’ils seront persécutés, il a aussi prédit que l’Église était invincible et que les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre elle (Mt 16.18).

3e thème : Pas un seul cheveu de votre tête ne sera perdu 

Jésus n’a pas promis à ses disciples qu’ils seront épargnés par les épreuves – il leur annonce même que plusieurs seront mis à mort à cause de lui – il leur a promis que Dieu connaît leurs cheveux et que pas un seul sera perdu.

La Bible n’est pas optimiste en ce qu’elle ne dit pas que tout va bien se passer ni que tout va s’arranger, elle parle de l’espérance d’un Dieu qui n’abandonne pas ses enfants. Comme le disait le théologien Jean Aubin : « On peut supposer que les chrétiens jetés aux fauves par Néron étaient remplis d’espérance plutôt que d’optimisme. Ils ne se risquaient pas à se dire que ça allait bien se passer, mais ils mettaient leur espérance dans la certitude, au-delà de l’épreuve, d’être accueillis dans la lumière de Dieu. »

Une illustration : Rien ne nous séparera de l’amour du Christ

Quand Jésus déclare que pas un seul cheveu de notre tête sera perdu, il croise la grande déclaration de l’épître aux Romains, lorsque Paul pose la question de ce qui pourrait le séparer de l’amour de Dieu. Il énumère les possibilités :  La détresse, l’angoisse, la persécution, la faim, le dénuement, le péril, ou l’épée ? Précisons que Paul ne fait pas de la théologie en chambre, toutes ces détresses, il les a connues dans son ministère lorsqu’il déclare : Trois fois j’ai été frappé à coups de bâton, une fois j’ai été lapidé, trois fois j’ai fait naufrage ; j’ai passé un jour et une nuit dans les abysses. Voyageant à pied, souvent ; exposé aux dangers des fleuves, aux dangers des bandits, aux dangers de la ville, aux dangers du désert, aux dangers de la mer, aux dangers parmi les faux frères…souvent dans les jeûnes, dans le froid et le dénuement… (voir 2 Co 11.25-27). Et pourtant il ajoute : Mais dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. Car je suis persuadé que ni mort, ni vie, ni anges, ni principats, ni présent, ni avenir, ni puissances, ni hauteur, ni profondeur, ni aucune autre création ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu en Jésus-Christ, notre Seigneur (Rm 8.35-38).

Pour aller plus loin :
Le théologien Antoine Nouis reçoit Christine Pedotti, écrivain, journaliste et directrice de la rédaction de Témoignage chrétien, pour discuter Luc 21, 5-19 : https://regardsprotestants.com/video/bible-theologie/les-signes-annonciateurs-de-la-crise/

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis