L’évangile du dimanche 4 août

Jean 6.24-35 – Les vrais et les faux signes

Introduction

La semaine dernière, nous avons lu la multiplication des pains au début de ce chapitre 6 et nous nous sommes arrêtés sur le verset qui dit que certains ont voulu se saisir de Jésus pour le faire roi, mais que ce dernier s’est retiré, seul dans la montagne.

Dans la nuit, les disciples traversent le lac sur un bateau et Jésus les rejoint en marchant sur l’eau. Lorsque la foule apprend que Jésus a traversé le lac, des hommes font de même pour le suivre. Leur rencontre permet à Jésus de tenir son discours sur le pain de vie qui parcourt toute la suite du chapitre.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

Titre : Le signe du pain

Notre texte joue sur la tension entre le pain que la foule a mangé lorsqu’elle avait faim et que Jésus a nourri avec cinq pains d’orge et deux poissons, et le pain qui vient du ciel. Le propre de la démarche spirituelle est de voir l’enseignement que l’on peut tirer des événements de la vie.

En français, on dit qu’on gagne son pain, mais la démarche de foi consiste à poser un regard spirituel sur le pain qu’on gagne.

Titre : La nourriture qui vient du ciel

Le verset fait le lien avec la manne : il leur donna à manger du pain venu du ciel. C’est une citation de deux Psaumes qui font une relecture de l’exode qui est au fondement de l’histoire, de l’éthique et de la foi du judaïsme (Ps 78.24, 105.40). Ces deux Psaumes jouent sur l’opposition entre les signes posés par le Seigneur et les infidélités du peuple. Cette tension traverse ce chapitre de l’évangile de Jean qui nous interroge sur notre propre fidélité.

Pistes d’actualisation

1er thème : Quiproquo sur la traversée 

Le soir, les hommes ont laissé Jésus sur la montagne et le lendemain, il est de l’autre côté du lac. La foule se demande comment il a traversé, elle ne peut s’imaginer qu’il a marché sur les eaux. Jésus ne répond pas à leur question, mais dévoile ce qu’ils ont dans le cœur : « vous mes cherchez parce que vous avez mangé des pains et que vous avez été rassasié. » On retrouve toute l’ambiguïté des foules qui est une quête de miracles.

Les hommes courent derrière Jésus à la recherche de miraculeux alors que le cœur de l’Évangile est la proclamation d’une foi qui ne nous fait pas sortir de notre humanité, mais qui nous ramène au cœur de notre existence la plus matérielle.

2e thème : Le vrai sens du signe

Le chemin que doit parcourir la foule est symbolisé par l’opposition entre deux événements. La veille au soir, la foule est prête à faire de Jésus son roi à la vue du signe de la multiplication des pains (v.14-15), et le lendemain elle lui dit : « Quel signe produis-tu donc, toi, pour que nous voyions et que nous te croyions ? » (v.30)

Le propre d’un signe est qu’il désigne autre chose que lui-même. La multiplication des pains ne dit pas que nous devons envoyer tous les boulangers au chômage, elle est le signe que Jésus est le pain de vie.

3e thème : L’œuvre de Dieu 

Le verset 29 dit que l’œuvre de Dieu, c’est que nous mettions notre foi en celui qu’il a envoyé, la personne de Jésus. L’œuvre de Dieu, la démarche de foi, c’est de tout considérer à partir de la personne du Christ.

On peut voir dans le pain un mélange, d’eau, de farine, de sel et de levure, on peut aussi y voir le signe d’un Dieu qui prend soin de nous dans toutes les dimensions de notre personne.

Une illustration : De la bonne compréhension du miracle

Les hommes ont traversé le lac parce qu’ils ont assisté à un vrai miracle, la multiplication des pains. Jésus les fait passer d’un désir de miracle à un cheminement plus profond et l’intériorisation de la parole.

Le miracle peut parfois être donné au commencement d’une histoire spirituelle, mais une foi adulte ne peut pas reposer dessus. Wesley a écrit à propos des manifestations miraculeuses : « J’ai souvent observé que ces symptômes se manifestent plus ou moins au commencement des grands réveils… mais au bout de quelque temps, ces phénomènes diminuent et l’œuvre se poursuit dans le calme et le silence. Ceux qu’il plaît à Dieu d’employer dans son œuvre doivent être absolument passifs à cet égard ; ce n’est pas à eux, mais à Dieu, de choisir les conditions dans lesquelles s’accomplit son œuvre. »

Le livre des Ephésiens du dimanche 4 août

Ep 4.17-24 – Un homme nouveau, une intelligence nouvelle

Le contexte – l’épître aux Éphésiens

Après avoir développé les grands thèmes de la grandeur cosmique du Christ, de la justification par la foi, de la réconciliation entre juifs et non-juifs et de l’unité dans les Églises, l’auteur de l’épître aux Éphésiens invite ses interlocuteurs à changer de comportement pour adopter une nouvelle façon de penser et une nouvelle façon de vivre.

La foi n’est pas l’accession à un savoir nouveau, c’est un changement de logiciel dans notre façon de voir le monde et nos prochains. 

Que dit le texte ? – De l’intelligence obscurcie à l’intelligence nouvelle

Le passage que nous méditons a de nombreux points communs avec l’épître aux Romains. Comme au premier chapitre de cette épître, Paul souligne que ceux qui n’ont pas la foi ont une intelligence obscurcie qui les empêche de voir les choses de Dieu, ce qui peut les conduire à la débauche.

À l’intelligence obscurcie il oppose l’intelligence renouvelée comme au chapitre 12 de l’épître aux Romains qui introduit la partie pratique par le verset qui dit : « Ne vous conformez pas à ce monde-ci, mais soyez transfigurés par le renouvellement de votre intelligence, pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, agréé et parfait » (Rm 12.2).

La foi induit une façon différente de penser et de voir : voir le monde comme Dieu le voit, penser le monde comme Dieu le pense. La foi ne concerne pas que le croire, elle touche notre intelligence, notre conception du monde et le sens de notre existence. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Changement de regard sur la nourriture

Le passage de l’évangile de Jean joue sur le quiproquo entre Jésus et la foule sur le regard porté sur la multiplication des pains. La foule voit surtout le miracle : « Si Jésus peut multiplier les pains, alors nous n’avons plus besoin de travailler ; si Jésus peut multiplier les pains, plus jamais nous n’aurons faim. Faisons-le roi et qu’il assouvisse tous nos besoins. »

Jésus donne un autre sens au miracle des pains pour en faire un signe du don de Dieu qui invite les humains à changer leur regard sur le pain, tous les pains qu’ils consomment.

En commentaire de la phrase du Notre Père qui demande à Dieu le pain quotidien, Luther a élargi la notion de pain en lui associant : le vêtement, la demeure, la santé, la famille, les voisins, les amis, la protection… L’intelligence de Dieu nous invite à considérer tout ce que nous avons de beau et bon dans notre histoire comme des effets de sa grâce. 

Le texte du Premier Testament du dimanche 4 août

Ex 16.2-15 – Le pain venu du ciel

Le contexte – L’Exode

Un élément récurrent tout au long de la marche dans le désert est la protestation des Hébreux qui cultivent la nostalgie de l’Égypte où certes, ils étaient esclaves, mais où ils avaient à manger. Le texte parle de marmites de viandes, mais peut-être que les Hébreux étaient touchés par le syndrome du « c’était mieux avant » parce que le livre de l’Exode parle de travaux forcés et de corvées épuisantes (1.11, 5.9).

Relisons la fable de La Fontaine, Le chien et le loup : Devant les incertitudes de la liberté, il arrive que l’asservissement apparaisse comme confortable. Les commentaires rabbiniques disent que si le peuple est resté quarante années dans le désert, c’est qu’il a fallu tout ce temps pour intégrer les catégories de la liberté : « Il a fallu une nuit aux Hébreux pour quitter l’Égypte, mais il a fallu quarante pour que l’Égypte quitte le cœur des Hébreux. »

Comme l’a écrit Jacques Ellul : « Ce n’est pas vrai que l’homme veuille être libre. Ce qu’il voudrait ce sont les avantages de l’indépendance sans avoir aucun des devoirs et des duretés de la liberté. »

Que dit le texte ? – La plainte du peuple et le don de la manne

Dans le récit précédent, le peuple s’est plaint que l’eau était amère, maintenant ils ont peur de mourir de faim. 

Le Seigneur répond à leur plainte avec le don de la manne et des cailles, le pain et la viande. La particularité de la manne est qu’elle devait être ramassée chaque jour car elle ne se conservait pas. Les sages ont fait de cette particularité une lecture spirituelle. Si la manne est le signe de la confiance en Dieu, celle-ci doit être entretenue tous les jours. Les biens spirituels ne se capitalisent pas, ils doivent être renouvelés tous les matins.

À propos de la manne, le Seigneur précise : vous saurez que c’est le Seigneur qui vous a fait sortir d’Égypte. La manne qui tombe du ciel peut finir par paraître un phénomène naturel, elle doit être vue comme le signe de la fidélité du Seigneur qui a libéré son peuple et qui ne cesse de le porter. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Le signe et le pain

Jésus dit à la foule qu’elle le suit parce qu’elle a été rassasiée. Elle s’attend à ce que Jésus renouvelle le miracle des pains. Jésus répond en disant que la multiplication était un signe qui désignait autre chose : il est le pain vivant descendu du ciel. Il ne faut pas confondre le signe et ce qu’il désigne.

Il en est de même de la manne et de la nourriture que nous partageons tous les jours. On peut la voir comme l’assouvissement de notre faim, mais nous devons la considérer comme le signe d’un Dieu qui prend soin de ses enfants. 

Rendre grâce avant un repas est une façon de se souvenir que tout ce que nous avons vient de Dieu. 

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis