Dix ans après la parution de l’ouvrage collectif « La nouvelle France protestante » (2011), voici un aperçu des recompositions du protestantisme français en 2021 : un peu plus de deux millions de fidèles, soit 3% de la population totale.

Ces deux millions se subdivisent en 54% d’évangéliques, 30% de réformés et luthériens, et 16% d’autres protestants. Par ailleurs, 9% de celles et ceux qui pratiquent régulièrement une religion en France sont protestants (EVS).

La décennie 2020 a commencé en France sous le signe de l’identité.

Alors qu’une pandémie inédite compromet les rencontres, accentue la distanciation
sociale, la population française en désarroi s’interroge sur ses médias, sur sa culture, sur sa laïcité, sur ses offres politiques et religieuses.

Le rôle des chercheurs dans ce contexte est de prendre du recul. Par rapport à une démocratie de l’émotion qui fonctionne sur le buzz et l’anecdote, et bien la valeur ajoutée de la recherche, c’est d’apporter des données vérifiables afin de mieux analyser, de mieux comprendre, les lignes de force d’une société qui évolue.

Cela permet d’éviter aussi le déni de réalité, qui nous condamne à rester sur des images arrêtées, qui datent parfois d’il y a 50 ans. Nous avons bien mieux à faire que cela.

En matière religieuse par exemple, il importe de pointer ce qui s’est recomposé en un demi-siècle. Ainsi aujourd’hui le catholicisme français représente quatre françaises et français sur 10, mais il ne prétend plus être la religion de la majorité. À ses côtés, l’islam rassemble en France environ 4 et 5 millions de fidèles. Puis vient le protestantisme, le bouddhisme, les églises orthodoxes, d’autres religions, avec aussi la montée des sans religion, qu’on étudie d’ailleurs trop peu.

Le protestantisme français, parlons-en. Le sociologue Jean-Paul Willaime vient de brosser le portrait de cette minorité active pour Fondapol en mars 2021. Il y a dix ans paraissait « La nouvelle France protestante ». Voici cet ouvrage collectif publié en 2011. Dans cet ouvrage, dans cette somme, une vaste équipe de chercheuses et chercheurs brossait le tableau d’un protestantisme profondément recomposé, mais aussi rajeuni et plutôt en croissance.

Qu’en est-il en 2021 dix ans plus tard ?

Il est temps de faire le point sur ces évolutions qui se sont poursuivis au cours de la dernière décennie. Je m’appuierai pour cela sur deux grandes enquêtes internationales portant notamment sur la France : l’enquête ISSP et l’enquête EVS, l’enquête Ipsos réalisée lors des 500 ans de la Réforme ainsi que les statistiques d’églises complète les sources.

Pour plus de détails je vous renvoie aussi à l’hebdomadaire Réforme qui comporte un article de synthèse sur la question.

Voici le tableau estimatif de la réalité démographique protestante en 2021, dix ans après « La nouvelle France protestante ».

Le protestantisme français dans l’hexagone peut être estimée à 3% de la population pour la métropole et l’outre-mer. Cela représente environ 2 millions 22 mille individus. Avec la répartition suivante au prorata de la population française, 0,5 % de la population appartient un protestantisme qui ne se déclare ni réformes, luthériens ni évangélique, 0,9 % de la population appartient au protestantisme réformé et luthériens et enfin 1,6 % de la population se rattache au protestantisme évangélique.

En chiffres absolus, ces estimations renvoient à 600 000 protestants luthériens et réformés, 1 100 000 protestants évangéliques et 340 000 autres protestants, dont les adventistes et les anglicans par exemple. A noter qu’entre ces trois pôles, ce sont les protestants évangéliques qui en moyenne sont les plus jeunes et les plus pratiquants.

En pourcentage de la population protestante, cela donne environ 30% de réformés et luthériens dans le total protestant, environ 54% d’évangéliques, majoritairement fédérés par le CNEF, le conseil national des évangéliques de France et environ 16 % d’autres protestants.

Nous sommes ici dans des ordres de grandeur dans l’attente d’enquêtes actualisées pour la décennie 2020. Les chiffres absolus peuvent différer un peu, mais les grandes lignes sont bien établies. Rappelons que ce protestantisme recomposé joue globalement le jeu de la laïcité et de la république via en particulier par un nombre record d’associations loi 1905, mais aussi un taux d’engagement associatif dans toutes sortes d’associations, quel que soit l’objet, bien supérieur à la moyenne nationale.

On note aussi une sur-pratique protestante par rapport à la pratique catholique qui connaît un recul selon une enquête européenne citée par Jean-Paul Willaime et Philippe Portier dans cet ouvrage que je vais vous montrer : « La religion dans la France contemporaine » publié en 2021. On y apprend que 9 % des pratiquants, de celles et ceux qui pratiquent régulièrement une religion en France, 9% d’entre elles et d’entre eux et bien sont protestants, sont rattachés à une église protestante.

Les églises protestantes connaissent aussi une certaine progression démographique et attire les jeunes. C’est aussi le cas de l’islam, du bouddhisme dans une certaine mesure. Le catholicisme quant à lui se recompose et connaît certains phénomènes de réveil.

Tout ça pour dire que les religions en France aujourd’hui, ce n’est pas qu’un héritage, les religions contribuent à co-écrire l’histoire nationale au 21ème siècle.

Et à ce titre, mieux connaître le protestantisme en 2021, et bien c’est aussi mieux comprendre ce pays laïc et pluriel, qui articule continuité et changement, conservatisme et réforme, des racines et des ailes.

Retranscription du texte de la vidéo de Sébastien Fath