Attitude

Lorsque nous sommes croyants, nous avons une très haute et très fière idée de ce que notre « statut » de chrétiens exigerait de nous face aux autres ou « pour » les autres. Nous sommes taraudés par cette affaire d’évangéliser ou de témoigner. Bien sûr, en tant que réformés, nous ne voulons pas évangéliser au sens de convertir, nous refusons le prosélytisme. Ce refus du prosélytisme a modelé une façon d’être des protestants réformés jusqu’à nous rendre totalement transparents ou invisibles, pour tous ceux qui ne font pas partie de « notre planète ».

La tradition

La tradition, dans le protestantisme, de fermer les temples lorsque la communauté n’est pas présente pour le culte, nous a conduit à exposer nos temples dans les villes, comme des visages sans traits. Ce sont des bâtiments qui, au mieux, sont repérés comme « lieu où les protestants se rassemblent », mais bien souvent, les passants ne les repèrent pas quand bien même ils se trouvent dans le centre des villes. À cela s’ajoute que la signalisation des villes ne nous avantage pas, car elle a tendance à oublier les temples. Ce n’est certainement pas un reproche envers les personnes chargées de ce travail, parce qu’il semblerait que nous nous intéressons très peu, nous-mêmes, à cette affaire de guider des gens vers notre temple puisque toute la communauté sait bien où il se trouve, génération après génération.

Sauf dans le temps que nous sommes en train de vivre.

Certainement nous portons des valeurs qui ont traversé les siècles depuis les temps de la Réforme : la capacité à résister, la fidélité dans nos convictions, le désir de vivre une foi éclairée par la raison et capable d’une réflexion en lien avec la culture dans laquelle elle évolue, une grande capacité d’engagement dans la société, le débat comme moyen de cheminer et de trouver des solutions ensemble. Nous en sommes fiers et avec l’œil qui brille quand nous nous rencontrons, nous ne prenons même plus la peine d’en parler entre nous, nous le savons bien.

Sauf que les autres, tous ceux qui vivent autour de nous aujourd’hui, ne le savent pas.

Et voilà internet qui nous sauve (excusez-moi, cela pourrait être interprété comme un blasphème), et voilà des personnes en quête de sens qui n’ont pas d’antécédents religieux et qui aspirent à vivre une vie spirituelle avec d’autres personnes, tout simplement. Voilà des personnes qui font une sorte d’audit de tout ce que les religions peuvent leur proposer et qui arrivent jusqu’à nous parce qu’il leur semble que la foi que nous portons serait celle à laquelle ils auraient envie d’adhérer. Et voilà un internet qui joue à l’Esprit saint ou sur lequel l’Esprit saint embarque pour permettre la rencontre. Et cela nous donne des ailes : oui il y en a d’autres à rencontrer, avec lesquels partager, et ainsi retrouver la joie d’échanger des moments, des jeux ou des activités, des réflexions et des conversations, partager notre foi, partager la vie.

Réveil

Et voilà nos Églises qui se réveillent : ici on ouvre le temple le samedi matin et on offre un café-croissant aux passants qu’on invite à entrer pour parler et se connaître ; là, on décide d’ouvrir le temple tous les dimanches même lorsqu’il n’y a pas de culte, des accueillants reçoivent ceux qui passent et entrent ; ailleurs, on se fait connaître dans la cité en proposant des concerts au temple ou en participant à la vie locale… Nous avons envie de recevoir ces nouveaux a mis que nous accueillons chez nous. Nous leur donnons notre adresse pour qu’ils ne se perdent pas en route, car nous ne voulons pas manquer le rendez-vous promis. Et quand ils sont là, nous leur parlons et nous les écoutons car nous avons à recevoir d’eux comme, nous-mêmes, nous sommes impatients de leur offrir ce que nous avons et ce que nous sommes. C’est dans cet échange que réside l’accueil et la rencontre.