Le synode de Lezay, dans le Poitou, est venu rétablir cette injustice et les synodaux en ont redemandé : du calme, de la nature, un cadre propice à la réflexion, à la maturation des idées, à la sagesse des décisions.

C’est en méditant le Magnificat que la présidente du Conseil National, Emmanuelle Seyboldt, a livré au synode son premier message. Le cantique de Marie (Luc 1,46-55) s’ouvre sur la joie : « Mon esprit s’est réjoui en Dieu, mon sauveur ». Cette joie, la présidente l’a vécue durant toute cette année : rencontres, échanges, courriels, courriers… La joie du travail à accomplir en équipes. La joie qui s’appuie sur la Paix que Dieu donne. La joie d’être au service d’un Dieu qui fait le choix du petit, du faible, comme Marie. Un véritable « renversement des valeurs », en somme ! Comment le vivons-nous en Église ? « Comment résistons-nous à la force ? à l’attrait de ce qui brille ? Comment nous alertons-nous mutuellement sur les dangers du racisme ? Comme restons-nous éveillés pour la protection des pauvres? » La joie de savoir que « la confiance en Dieu conduit la personne à changer de comportement, de manière d’être ». Et comment en serait-il autrement ? La foi s’incarne. Croire et vivre, c’est lié. « La foi invite à la cohérence ». En Église locale, il nous faut penser cette cohérence.

La joie de l’espérance

La joie aussi de voir au-delà de la simple réalité, au-delà des faits, comme Marie quand elle dit : « Dieu a renversé les puissants ». Certes, ils exercent encore leur règne au temps de Marie, et aujourd’hui encore, mais en espérance, Marie voit les signes d’un autre monde. « Le chrétien a vocation à être cet insensé qui voit toujours ce que les autres ne voient pas, comme Marie ». Ce qui explique qu’il est dans la louange et dans la lutte. Comment vivons-nous cette espérance en Église ? « Sommes-nous prêts à la discerner dans nos assemblées vieillissantes, nos finances tristounettes ? » Certes, nous n’avons peut-être que 5 pains. Mais nous avons toutes nos chances. Et surtout, tout nous est donné pour nous nourrir, pour puiser notre force pour parcourir le chemin : la Bible. Nous pouvons aussi nous appuyer sur la nuée des témoins. Tous ceux qui, à la suite de Marie, comme Luther et Luther King, ont su dire l’aujourd’hui de l’espérance : « Avec cette foi, nous serons capables de faire de ces montagnes de désespoir, des pierres d’espérances » (M.L. King). Les montagnes sont différentes mais le combat est toujours à mener, notamment pour lutter contre « la déshumanisation des personnes migrantes ou la lutte contre le réchauffement climatique». Prenons notre place au sein du chœur des témoins qui entonnent : « Magnifique est le Seigneur ». Et de terminer par cette exhortation : « Attendons-nous à Dieu : Il vient. »

La joie d’un appel

En soi, cette exhortation résonnait comme un appel. Le thème synodal, qui faisait suite à un vœu de 2015, était consacré justement à cette question : Vivre d’un appel. Comment le vivons-nous ? Le sujet fut traité en plusieurs étapes, à partir d’un texte biblique (1 Co 7,17-24). D’abord, comme nous devions venir avec un objet qui nous faisait penser à l’appel (chaussures de marche, cloches, bâton, lampe et bien d’autres objets insolites étaient présents), nous avons été invités, lors du premier temps, à échanger en petits groupes, puis en plus grands, sur le sens que représentait cet objet. Lors du deuxième temps, nous nous sommes penchés sur le sens du texte en petits groupes, puis en plus grands. La richesse du passage a été évoquée mais aussi les questions qu’il posait : promotion du statu quo social… Toutes ces questions furent « récoltées » pour le débat du soir qui constituait le troisième temps. Sans conteste le plus riche. Élian Cuvillier, professeur à l’IPT de Montpellier, a pris à bras le corps toutes les questions. Il a souligné d’abord un paradoxe : Paul le héraut de la grâce, « prescrit » un comportement. La grâce s’impose, alors même que la Loi est à  disposition des croyants, une ressource pour leur vie. Que « prescrit » l’apôtre ? De vivre dans l’appel ! Il prescrit de rester dans la situation d’être appelé. Toujours en mouvement, sur le fil de l’arête… Est-ce un statu quo ? Pas forcément. D’ailleurs, le verset 21 peut se comprendre de deux façons différentes : soit Paul exhorte l’esclave à faire de sa servitude le lieu de son obéissance chrétienne, soit l’apôtre invite l’esclave à saisir l’occasion de sa liberté pour cesser d’être esclave. Cette double lecture, qu’il n’est pas possible de trancher, permet de comprendre combien l’interprétation se livre à plus d’une interprétation. Nous nous sommes appropriés et avons discuté ces profondes remarques lors du quatrième (jeu de piste) et cinquième temps consacré au thème synodal ; un temps au cours duquel nous réfléchissions à la transmission de ce que nous avions vécu.

La joie des initiatives

Le synode national, c’est aussi l’occasion d’entendre les multiples initiatives, souvent méconnues, que notre Église met en place dans de nombreux domaines : la catéchèse, les réseaux jeunesse (le rapport du secrétaire national fera sans nul doute date), les formations portées par la Coordination Évangélisation et Formation, l’Institut Protestant de Théologie… Le synode national, comme les synodes régionaux, s’illustre également par les vœux, portant le souci du monde. Cette année, un vœu invitait le Conseil National à « faire part aux pouvoirs publics de l’opposition du synode à l’orientation générale des mesures législatives » concernant les migrants et un autre, adressé à la Fédération Protestante de France, portait le souci de la modification de la législation encadrant les séjours et camps de jeunes organisés par les mouvements et associations d’éducation populaire. Enfin, un synode, ce sont des invités. À Lezay, une délégation de l’Église coréenne était présente. Ce fut un moment fort de voir son président manifester son espérance pour la paix à venir entre les deux Corées. Un synode résolument tourné et marqué par l’Espérance.