Dans les Églises protestantes, deux réactions s’imposent à l’évocation des réseaux sociaux. L’une, prudente, relève l’impossibilité de maîtriser les informations qui circulent sur Twitter, Facebook, TikTok ou autres. La communication ecclésiale y serait rapidement noyée et critiquée. L’autre réflexion est plus enthousiaste et constate que les jeunes générations vivent en communautés reliées et utilisent ces réseaux au quotidien, elles y sont éduquées.

Témoignage de foi

La réalité semble plus complexe car ces réflexions se fondent sur des visions différentes de l’Église. La version prudente aura souvent tendance à valoriser la vérité de l’expérience de foi personnelle ou communautaire et la permanence du Dieu de la grâce. Face à la déchristianisation de la société, il importe de réaffirmer les principes protestants, d’informer et de former, de partager ses idées et les actions que l’on prévoit. C’est le témoignage d’une Église qui vit sa foi, vers un monde susceptible de prendre conscience de Dieu.

La version enthousiaste relie les différentes expériences et pensées pour créer un nuage de témoignages et de démarches spirituelles dans lequel chacun trouvera sa place. Elle s’attache souvent moins à la communauté ecclésiale qu’à la force de l’expérience individuelle.

Entre l’Église et le monde

En créant des journaux puis des sites Internet, l’Église protestante unie est héritière de la vision prudente et cherche aujourd’hui à diversifier sa communication pour s’adapter aux nouveaux médias. La refonte des sites nationaux ou locaux en est un signe, tout autant que la volonté de produire des podcasts ou de favoriser une convergence des médias protestants.

Mais bâtir des ponts entre le monde et l’Église n’est pas aisé. Car la porosité est faible entre l’extérieur et l’intérieur des Églises. Les influenceurs protestants que sont les sociologues, théologiens ou paroissiens soucieux de partager leurs ressentis ont développé sur les réseaux sociaux une sphère d’influence importante. Et ce nuage d’opinions personnelles semble assez indépendant de la communication et des médias d’Église.

Un clic suffit

Certes les Églises ne parlent pas qu’à elles-mêmes en communiquant et en informant. Mais au regard de la force et de la variété du nuage protestant présent sur les réseaux sociaux, la très faible participation des paroisses et des institutions a créé un vide. Il suffit pour le comprendre de saisir qu’un clic est nécessaire pour rechercher des informations sur un site Internet, là où les réseaux sociaux informent automatiquement l’utilisateur. Un clic est peu de chose. Mais cliquer implique d’être en recherche, là où recevoir un message vient interroger la rencontre des idées.

La parole libérée d’Elon Musk est un risque énorme de voir fleurir n’importe quoi sur les réseaux. Mais cela permet de se rendre compte de la marge de manœuvre disponible aux communautés protestantes pour partager idées et rencontres.