Avec sa longue barbe, Frère Daniel ne passe pas inaperçu. Ce natif de Neuchâtel, en Suisse, dit avoir « senti très jeune une vocation pastorale et œcuménique ». Il faut dire que l’Église évangélique réformée du canton de Neuchâtel, dont il est issu, est celle qui a consacré les premiers frères de Taizé, tous protestants. C’est donc tout naturellement dès l’âge de 18 ans, qu’il se rend dans la communauté bourguignonne, «pour voir». En 1966, il y rencontre un Italien, Enzo Bianchi, alors étudiant en économie et commerce. Une rencontre providentielle. Ce dernier vient de s’installer dans le hameau de Bose, sans eau ni électricité, répondant à ce qu’il estime être l’appel de Dieu à mener une vie de prière et de fidélité à l’Évangile, dans l’attente des promesses du Royaume. Dans l’élan du Concile Vatican II, Daniel Attinger le rejoint, ainsi que trois autres jeunes… dont une femme !

L’évêque de Turin de l’époque donne sa bénédiction à leur vie communautaire, «une structure de style monastique, qui a obtenu entre temps le statut d’association de fidèles, rattachée à l’Église catholique et ouverte aux autres Églises », explique frère Daniel. Tandis que la communauté se structure et se déploie, Frère Daniel est envoyé à Jérusalem en 1981. Les 33 ans qu’il y passe, à l’écoute des diverses communautés chrétiennes tout comme du monde juif, affûtent sa compréhension des textes bibliques. Et renforcent encore sa passion pour l’unité entre chrétiens, dont il déplore l’actuelle impasse : «Les relations se crispent et c’est un contre-témoignage fondamental. Tant que nous sommes divisés, nous sommes des chrétiens désobéissants».

Le dialogue interreligieux, un ersatz ?

Le pasteur moine est convaincu que «les grands motifs de division ne sont plus théologiques mais politiques : il faudrait que les autorités des Églises renoncent à leurs positions de pouvoir, mais elles n’y sont pas prêtes…» Quant au dialogue interreligieux, s’il le juge «essentiel» pour lutter contre la pauvreté et en faveur du climat, il le trouve «moins important que le dialogue œcuménique» et se demande s’il n’est pas «une mode, en ersatz de ce dernier, qui ne débouche plus sur rien. Je suis un peu critique et pense qu’après les premiers pas, toujours enthousiasmants, il finira comme le dialogue œcuménique…» La vie de prière et de travail, que Frère Daniel partage avec les près de 80 autres moines et moniales que compte désormais la communauté de Bose, continue néanmoins de nourrir son Espérance.

Questions insolites…

Ce que vos parents vous ont transmis et dont vous êtes fier ? Leur capacité de vivre ensemble pendant plus de 50 ans. Ils ont réussi une sorte de chef-d’œuvre. Et grâce à eux je suis devenu chrétien.

Votre plat préféré gamin ? C’était la purée avec du thon. J’aime toujours ça… Mon grand-père disait que « la viande est le meilleur des légumes » et c’est vrai que j’aime les plats avec de la viande.

Le dernier livre que vous avez lu ? Un livre sur les miracles de Jésus, d’un auteur allemand.

La dernière fois que vous avez ri ? Maintenant !…

La dernière fois que vous vous êtes mis en colère ? Je ne suis pas un colérique…

La dernière fois que vous avez pleuré ? Lorsque j’ai enterré ma mère.