En rebond de l’article mis en ligne la semaine dernière, voici d’autres propositions pouvant nourrir le débat sur le clivage droite-gauche.
Frédérick Casadesus
20/11/2023
Le blog de Frédérick Casadesus
La ville d’Angers calque parfois ses pratiques sur celles d’Athènes au temps de Périclès. On y discute avec ferveur comme sur l’Agora de jadis. En marchant place Lafayette, l’auteur de ces lignes se fit alpaguer par un ami au sujet du clivage gauche- droite : « Je partage très peu le point de vue de ton interlocuteur, nous déclara Pierre-Yves. En ce qui me concerne, je fais très bien la différence entre une gauche qui protège les plus faibles et une droite qui favorise les plus forts. » Bigre ! Affirmée de la sorte, cette interprétation rangeait la gauche dans le camp du bien, la droite dans le camp du mal. Rien de moins. Pierre-Yves laissait parler son cœur, tout comme un électeur de droite peut, dans le vif d’une conversation, prétendre qu’avec la gauche au pouvoir, le désordre est assuré. Mais la critique, même formulée d’une façon brutale, a porté. Plutôt que de passer notre chemin, nous avons pensé judicieux de remettre sur le métier notre ouvrage afin de proposer de nouvelles analyses de ce clivage.
Première observation : oui, trois fois oui, l’opposition de la droite et de la gauche demeure. Une forme de radicalité la rend même plus éclatante aux extrémités du spectre politique. Mais cette opposition provoque aussi des convergences entre la droite et la gauche traditionnelles, une extension du centre, au point que ce qu’avec humour Alain Juppé nommait « le cœur de l’omelette » aujourd’hui domine le jeu. Comment l’expliquer ?
« Trois phénomènes, étroitement liés, qui étaient à l’œuvre au début des années 1990, mais dont les effets n’ont cessé de s’amplifier depuis, ont déstabilisé les repères politiques qui prévalaient depuis 1945, écrit Marcel Gauchet dans son ouvrage « La droite et la gauche, histoire et destin » (Gallimard, 169 p. 14 €) : la victoire culturelle totale des principes de la démocratie libérale, la disqualification, au-delà de l’idée communiste, du projet de contrôle public de l’économie, et la globalisation économique et financière, avec ses effets en retour. »
Il est vrai que les extrémistes des deux bords contestent le bien-fondé d’une telle évolution. Mais avec force Marcel Gauchet constate qu’eux aussi plient devant elle: « La nature intrinsèquement opportuniste et démagogique des mouvements populistes les a conduits à s’éloigner de leurs origines, voire à les répudier. » De là vient le sentiment que la frontière entre la droite et la gauche disparaît. Même la comparaison de leurs mérites dans le domaine social invite à prononcer ce constat. Certes, l’attention constante apportée par les partis de gauche aux plus démunis leur donne d’indéniables états de services – les congés payés, la réduction du temps de travail ou la retraite pour tous, voilà qui compte – mais les partis de droite ont aussi su mettre en place des dispositifs protégeant les plus démunis, notamment la création de l’ANPE, l’instauration d’un salaire minimum et de l’autorisation administrative de licenciement.
Cela signifie-t-il qu’il faille renoncer à des identités si puissantes ? Evidemment non. « Les enjeux peuvent paraître se diluer, le contenu des conflits se brouiller, le noyau logique qui commande la distribution antagoniste des positions n’en demeure pas moins intact. », écrit encore Marcel Gauchet. Disons que droite et gauche, bien qu’elles sommeillent, existent toujours parce qu’elles ouvrent chacune une fenêtre sur le monde.
Alexandre de Vitry, maître de conférences à la Sorbonne, décrit bien ce qui les sépare dans un essai plein d’astuce et d’intelligence, « Sous les pavés la droite » (Desclée Debrouwer, 208 p. 17,90 €) : « On est de droite parce que l’on ne croit, comme Baudelaire et Balzac, qu’aux progrès de l’Homme sur lui-même, à l’énergie individuelle, à la lutte de chacun contre le péché originel, et non à la perfectibilité sociale, à la réconciliation de l’humanité avec elle-même, au « salut du genre humain par les ballons », comme disait Baudelaire en se moquant de Victor Hugo ». Méfiante à l’endroit des aventures collectives, la droite se pique de liberté, lorsque la gauche, rétive à l’affirmation du Moi dans l’espace public, s’étourdit de fraternité. Quant à mettre en application ces nobles ambitions, c’est une autre paire de manche.
En bonne tautologie, nous pourrions déduire que « les Hommes sont les Hommes. » Eh bien, justement, des hommes – et des femmes bien sûr – il est question dans le merveilleux petit livre d’Eric Roussel, « C’était le monde d’avant, carnets d’un biographe » (Alpha, 302 p. 9 €). Récit personnel des rencontres que cet écrivain-journaliste a vécues, ce volume de poche est un voilier de plaisir.
On y croise les figures tutélaires de notre vie politique et deux ou trois personnages singuliers. Or, à chaque page ou presque, on aime l’incongru, le détail qui distingue, le trait qui donne du relief. Pierre Mendes-France, homme de gauche, y révèle une authentique admiration pour le conservateur Poincaré ; Pierre Mauroy, Premier ministre d’un gouvernement comprenant des communistes, freine le train déchaîné de la politique de relance alors que son électorat demande à corps et à cri l’augmentation de son pouvoir d’achat. De l’autre côté du spectre, Jacques Chaban-Delmas engage la Nouvelle Société que le Président Pompidou condamne moins par principe que par souci de faire respecter sa propre autorité, tandis que Valéry Giscard d’Estaing, libéral éclairé, met en œuvre des réformes audacieuses. On voit par là que, suivant l’adage du café du Commerce, rien n’est jamais simple et tout se complique toujours.
« A la fin, nous disait récemment un philosophe, je crois que les notions de « gauche » et de « droite » n’ont aucun sens. Tout s’organise de façon verticale : dans les caves, il y a les extrêmes, au milieu se trouvent les partis politiques traditionnels et, tout en haut, Charles de Gaulle. » Auprès du Général, nous sommes convenus d’installer un petit-fils de paysan…
Le blog du journaliste Frédérick Casadesus, auteur notamment de "Douze protestants qui ont fait la France", aux éditions du Cerf. Frédérick Casadesus est un collaborateur régulier de Fréquence Protestante, du journal Réforme et de Regards protestants.
Cette bande dessinée qui célèbre les gardes du corps du général de Gaulle nous plonge avec délice dans un passé qui n’est pas aussi révolu qu’on le croit.
L’historien Nicolas Roussellier, professeur à Sciences Po, nous livre son analyse sur la situation politique du pays, douze mois après l’élection européenne, suivie d’élections législatives anticipées.
Le plus grand éditeur de livres d’histoire est mort hier, lundi 2 juin, à 93 ans. Hommage à Pierre Nora, historien, auteur, membre de l'Académie française.
Que représente le désert dans notre culture ? Marie Gautheron, enseignante à l’Ecole normale supérieure de Lyon, publie un ouvrage magnifique pour le comprendre.
En maître de l’absurde, Quentin Dupieux nous emmène dans un thriller lunaire et cruel, aux accents parfois horrifiques, pour un portrait acide de notre société connectée.
Le ministre de la Défense israélienne, Israël Katz, a dévoilé un plan visant à construire une « ville humanitaire » sur les restes de Rafah, ardemment bombardée par Tsahal. Celle-ci devrait accueillir les Gazaouis avant de les inciter à « émigrer volontairement » vers d’autres pays. Un programme dénoncé comme un crime contre l’humanité.
La loi Duplomb visant à simplifier le métier d’agriculteur a définitivement été adoptée par le Parlement mardi 8 juillet avec, parmi les mesures, la controversée réintroduction de l’acétamipride, un néonicotinoïde considéré comme dangereux pour la santé humaine et celle des pollinisateurs.
Katia, brillante documentaliste de 35 ans, fait preuve de singularité dans sa manière de vivre ses relations, toutes plus ou moins chaotiques. Sa participation à un nouveau reportage l’amène enfin à mettre un mot sur sa différence.
Le président français s’est rendu au Royaume-Uni ce mardi 8 juillet pour une visite d’État de trois jours afin de renforcer « l’entente cordiale » régnant entre les deux pays. Quelque peu refroidies depuis le Brexit de 2020, les relations entre la France et le Royaume-Uni semblent désormais chaleureuses, laissant présager une alliance entre les nations.
Il existe mille et une façons d’explorer la Bible. Parce que sa lecture est une aventure personnelle, quatre femmes nous racontent comment elles la vivent, chacune à leur façon.
Nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Nous le faisons pour obtenir des statistiques de visites et améliorer l'expérience de navigation. Consentir à ces technologies nous autorisera à traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Ne pas consentir ou retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines fonctionnalités.
Fonctionnel
Toujours activé
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Préférences
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Statistiques
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Marketing
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.