Depuis des années, les mondes du spectacle, des musées ou de la musique constatent que forces politiques et médias ne guettent plus, dans la vie culturelle, que l’occasion sporadique d’enflammer la mèche d’un pétard.
Il est vrai qu’entre une gauche récitant mécaniquement la vulgate de l’émancipation par la culture et une droite réduisant volontiers l’intérêt des équipements culturels au seul retour sur investissement des engagements budgétaires, le macronisme n’a pas élaboré de doctrine nouvelle.
Son grand projet, le Pass Culture, s’est peu à peu imposé dans le quotidien de millions d’adolescents et d’enseignants. Mais il n’attire plus la lumière – ni celle de la fierté des bilans, ni même celle des critiques.
Comment en serait-il autrement ? Le personnel politique se détourne volontiers d’une culture publique confrontée à des menaces aux contours arides – maigreur des investissements, effondrement du « disponible artistique » des théâtres et opéras publics, menaces sur le patrimoine bâti des collectivités territoriales…
Or l’idée d’une politique culturelle armée par la puissance publique pour souder la République a fini par perdre de sa réalité concrète. D’ailleurs, Rachida Dati sera la septième ministre de la Culture consécutive à ne pas tenir à ce poste plus de deux ans – et donc incapable de mener aucun chantier de bout en bout. Ce manifeste abandon par le personnel politique d’une vision de la culture globalement consensuelle entre droite et gauche tout au long de la Ve République prélude-t-il à sa remise en cause par l’extrême-droite, qui n’y a jamais caché son hostilité viscérale ?
Bertrand Dicale, journaliste, pour « L’œil de Réforme »