Il ressort de l’enquête « Vivre avec l’intelligence artificielle: opportunité ou menace ? », menée par l’institut Ipsos fin 2024 dans onze pays, que 60% des personnes interrogées ont peur de l’impact de l’IA sur le monde dans lequel elles vivent. Seuls les répondants chinois et japonais sont majoritairement confiants.
« On est en train de prendre conscience du fait que l’intelligence artificielle nous remplace pour des tâches intellectuelles; des machines prennent des décisions pour nous», analyse l’anthropologue Daniela Cerqui, maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne. «Cela fait pourtant belle lurette que les voyageurs roupillent dans l’avion en sachant que le pilote roupille aussi et que c’est le pilote automatique qui est aux commandes », donne-t-elle comme exemple.
« L’expression ‹intelligence artificielle› est un coup de marketing incroyable d’un projet de recherche des années 1950 », pointe le juriste et éthicien Johan Rochel, chargé de cours à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). « Lorsqu’on dit les mots ‹intelligence artificielle›, cela implique qu’il y en a une naturelle et, assez logiquement, on les met en compétition. Sur ces questions, nous nous faisons matraquer par les messages commerciaux et les médias participent à la propagation de ces clichés », dénonce-t-il.
« La pop culture nous a habitués à cette idée qu’une technologie apparaît et provoque la révolution dans les trois semaines, mais dans la réalité, il faut du temps pour que les usages possibles ou utiles d’un nouvel outil se stabilisent. En fait, on a tendance à surestimer l’impact d’une nouvelle technologie à court terme alors qu’on en sous-estime l’impact à long terme », explique Johan Rochel.
Repenser notre image
L’arrivée, il y a deux ans, des intelligences artificielles génératives accessibles au grand public nous a obligés à repenser l’image que l’humain se fait de lui et de sa […]