Le monde connaît actuellement sa septième pandémie de choléra. “Elle dure depuis déjà soixante ans”, précise à BFMTV François-Xavier Weill, professeur responsable du centre national de référence Vibrions et choléra à l’Institut Pasteur. D’ailleurs, même la France métropolitaine comptabilise plusieurs cas chaque année. Mais selon les autorités sanitaires, lundi 29 avril, Mayotte comptait vingt-neuf cas confirmés de choléra. Entre vendredi et lundi, le nombre de cas confirmés a été multiplié par deux.

L’alerte sanitaire a été lancée à la mi-mars. Bastien Morvan, le directeur de cabinet de l’Agence régionale de santé à Mayotte, insiste sur le fait que les cas sont localisés. “Ils ont tous été notifiés dans la même commune”, confirme-t-il. Il s’agit de Koungou, situé dans la partie nord de l’île. Autre point important, il s’agit de cas “autochtones”. C’est-à-dire qu’ils se sont déclarés sur place, quand les premiers cas avaient été importés des Comores.

L’importance de l’accès à de l’eau claire

Concernant la propagation de la Vibrio cholerae, la bactérie responsable du choléra, elle se propage “par les mouvements de populations et est favorisée par les manquements à l’hygiène et de défauts d’assainissements des eaux usées”, indique François-Xavier Weill. Si bien que la bactérie peut passer directement d’humain à humain. De l’eau contaminée par des déjections humaines peut également la véhiculer. En 2010, après le séisme du mois d’octobre, par exemple, une épidémie de choléra a frappé Haïti. Des Casques bleus originaires du Népal ont amené la bactérie jusqu’à la zone déjà en proie à une crise humanitaire et sanitaire sans précédent. “C’est une maladie qui suit les malheurs humains”, commente François-Xavier Weill.

La bactérie, qui bénéficie d’un réservoir en Asie du Sud, nécessite une gestion des eaux grises importante. Les personnes infectées souffrent de “vomissements et de diarrhées terribles” chargés en bactéries. Au point qu’une mauvaise gestion de ces déchets peut favoriser la multiplication des infections. L’accès à l’eau claire, propre et potable, est primordial pour éviter les épidémies. Justement, la disponibilité de l’eau pose régulièrement des problèmes à Mayotte. Un jour sur trois, le réseau d’eau potable est coupé, selon un post sur X du député LR Mansour Kamardine. Mais selon l’ARS, l’eau distribuée dans le réseau est potable. Elle “fait l’objet d’un contrôle régulier et systématique”, affirme l’agence qui reconnaît cependant la vulnérabilité des habitants dont les habitations ne sont pas raccordées au réseau.

“Très faible densité de professionnels de santé”

“Globalement, l’explication [de cette multiplication de cas, NDLR] est multifactorielle (…) nous avons affaire à des transmissions du choléra qui peuvent découler d’une faute d’hygiène, avec une contamination des mains”, déclare le cadre de l’ARS Mayotte. Heureusement, le traitement des malades s’avère plutôt simple. La mortalité liée au choléra a d’ailleurs été jugulée grâce à un protocole de réhydratation des malades. Parfois, il est nécessaire de le conjuguer avec une prise d’antibiotiques. Ce qui pose problème à Mayotte, c’est la “très faible densité de professionnels de santé”. Aussi, la crise sanitaire actuelle met les soignants à rude épreuve.

Deux “unités choléra” sont actuellement actives pour traiter les malades. “Le CHM a dû fermer une partie de l’activité de ses dispensaires et de ses premières consultations non urgentes pour assurer l’activité de cette deuxième unité anti-choléra”, indique Bastien Morvan. Des renforts devraient arriver dans les prochains jours, afin de soulager les besoins à l’hôpital et sur le terrain. Outre le traitement, des soignants sont mobilisés pour “étouffer toute propagation de la maladie”. Ils dépistent, vaccinent la population et effectuent des maraudes lors desquelles ils distillent des conseils comme celui de bien se laver les mains.