Les produits à base d’opioïdes ont causé 60 000 des 72 000 décès par overdose aux États-Unis en 2017. Cette épidémie a débuté dans les années 1990, lorsque la firme Purdue Pharma, créatrice du médicament OxyContyn, a réussi à élargir la prescription des antidouleurs à base d’opioïdes, jusqu’alors réservés aux cancers, à tous les types de douleurs chroniques. Les populations touchées furent alors celles qui avaient les moyens de consulter un médecin : les classes moyennes, blanches, proches de la quarantaine, rurales ou résidentes de la Rust Belt, hommes et femmes confondus. Mais l’effet d’accoutumance poussa ces patients, puis leurs proches, à détourner l’usage de ces médicaments.

En réaction, à partir de 2010, les pouvoirs publics commencèrent à restreindre l’accès à ces produits. Les usagers « accro » se tournèrent alors vers des opioïdes illégaux : d’abord l’héroïne, vendue par les cartels mexicains, puis, à partir de 2013, des opioïdes de synthèse beaucoup plus puissants, comme le Fentanyl et le Carfentanyl, exportés aux États-Unis par des laboratoires chinois. Cette évolution a fait exploser le nombre de surdoses mortelles. À la différence de l’épidémie de crack dans les années 1980, dont les victimes noires et latinos ont fait l’objet d’une politique d’incarcération de masse, celles de l’épidémie d’opioïdes sont présentées comme des victimes innocentes.

L’état d’urgence sanitaire a été proclamé en octobre 2017 par le président Trump. Un budget de six milliards de dollars a été dégagé pour permettre une prévention renforcée, ainsi qu’un meilleur accès aux […]