Mais les questions sensibles risquent bien de ne pas être à l’ordre du jour de cette rencontre. Selon le théologien Assaad Elias Kattan, le concile panorthodoxe, prévu en juin, représente une chance pour l’œcuménisme : Cette rencontre des primats des quatorze Églises orthodoxes existantes dans le monde pourrait en outre représenter un appel à l’unité pour l’Église orthodoxe. Les espoirs du professeur de théologie orthodoxe ont été nourris par la conférence préparatoire réunissant les représentants les plus importants de l’orthodoxie qui a eu lieu récemment à Chambésy près de Genève durant sept jours.
Un ordre du jour vétuste
Chercheur au Centre d’étude des religions de l’université de Münster, le professeur Kattan reste toutefois sceptique quant à l’espoir que le sommet orthodoxe ait une portée comparable à celle qu’a eue le concile Vatican II dans l’Église catholique. Aucune prise de position n’est prévue à l’agenda du concile panorthodoxe. D’après le théologien, le principal problème de la conférence panorthodoxe tiendrait à son ordre du jour vétuste, établi il y a 50 ans, et non adapté au XXIe siècle : C’est pourquoi j’espère que la conférence panorthodoxe constituera avant tout un prélude à un concile ultérieur qui traitera en profondeur toutes les questions cruciales, sans les mettre à l’écart comme c’est le cas aujourd’hui. Le professeur a ainsi mis en exergue la relation de l’Église orthodoxe et de l’État, une réforme de la liturgie, le rétablissement des évêques mariés et la place des laïcs et des femmes, thèmes qui ne seront vraisemblablement pas abordés par le concile à Pâques.
Un calendrier différent
Parmi les questions qui ne sont probablement plus à l’ordre du jour du concile se trouve l’unification du calendrier pour les dates des grandes fêtes chrétiennes. Ce serait formidable si les orthodoxes adoptaient le calendrier grégorien moderne, ce qui permettrait à toute la chrétienté de célébrer Pâques et Noël le même jour, a déclaré le professeur Kattan. Pour le moment, la majorité des orthodoxes ne célèbrent pas ces deux fêtes en même temps que les chrétiens catholiques et protestants. La question du calendrier avait déjà créé des scissions lorsque certaines Églises orthodoxes avaient décidé d’adopter le calendrier grégorien, rappelle le professeur Kattan, et c’est ce que l’orthodoxie appréhende, d’où les hésitations à poursuivre le débat. Certaines Églises orthodoxes s’en tiennent uniquement à l’ancien calendrier julien, d’autres suivent un mélange entre calendrier julien et calendrier grégorien, comme l’Église orthodoxe grecque ; et enfin, l’Église orthodoxe de Finlande ne suit que le calendrier grégorien.
Une relation en régression
À propos de l’œcuménisme entre orthodoxes et protestants, le professeur Kattan affirme que des voix indifférenciées amalgament protestantisme et sécularisme, surtout dans les Églises orthodoxes russes. Fort de plus de 300 Églises membres, le Conseil œcuménique des Églises à Genève offre au contraire une tribune où orthodoxes et protestants travaillent en coopération malgré les tensions existantes. Orthodoxie et protestantisme partagent pourtant le même Évangile et la même croyance en Jésus-Christ. Le professeur Kattan espère donc que le concile panorthodoxe permettra le renforcement de l’engagement orthodoxe dans l’œcuménisme et pour l’œcuménisme. Il note également une régression de l’œcuménisme depuis les années 1990, non seulement chez les orthodoxes, mais également chez les protestants, et même au sein de toute la chrétienté. De nombreuses confessions ont une réflexion plus centrée sur elles-mêmes, sur leur propre identité. Toutefois, l’œcuménisme n’est pas uniquement fait d’harmonie, mais également de dialogue et de discussion, dont fait partie la différence d’opinions, conclue-t-il.