De tout temps, les civilisations ont essayé d’encadrer la violence par des règles de droit. La légende des Horaces et des Curiaces donne l’exemple d’une guerre remplacée par un combat entre trois champions de chaque camp. Le même thème se trouve dans la Bible dans le duel entre David et Goliath. Dans l’histoire, l’Église a essayé d’encadrer la guerre, d’encourager le jeu diplomatique et de favoriser les échanges de prisonniers. Au Moyen Âge, la « trêve de Dieu » interdisait les combats en fin de semaine et pendant le calendrier liturgique du premier jour de l’Avent à l’Épiphanie et du mercredi des Cendres jusqu’au huitième jour après Pâques. L’utilisation de l’arbalète fut interdite au deuxième concile de Latran, en 1139, sous peine d’excommunication, mesure qui n’a tenu que quelques décennies.
Toutes ces régulations ont sauté à l’époque contemporaine. Les grandes guerres du vingtième siècle ont été des guerres totales. Tous les moyens ont été utilisés comme les gaz dans les tranchées de la Première Guerre mondiale et la bombe atomique lors de la suivante. Le bombardement des villes (Dresde, Hiroshima, Grozny, Alep, Marioupol, Gaza…) est devenu un moyen d’affaiblir l’ennemi en terrorisant les populations civiles.
Empêcher le pire
Clausewitz disait qu’introduire un principe modérateur dans la philosophie de la guerre était une absurdité. La guerre n’est jamais juste, elle est toujours sale car elle ouvre les écluses du mal. Rappelons-nous que les généraux en 1914 pensaient que la guerre ne durerait que quelques mois. Elle s’est terminée quatre ans plus tard après des millions de morts et a laissé en héritage la grippe espagnole, qui a fait plus encore de victimes que les combats, et un traité de paix portant en germe les malheurs du siècle.
Plus récemment, la coalition qui a envahi l’Irak avait pour objectif de rétablir la démocratie, au final elle a causé une guerre civile déstabilisant toute la région. Les guerres en Ukraine et à Gaza ne sont pas terminées, mais nous savons déjà que leurs résultats seront désastreux au regard de leurs motivations. Parce que la guerre est une maladie mortelle et contagieuse, il est important de tout faire pour la juguler. Nous avons besoin de toutes les intelligences pour cela : penser le pire pour que le pire n’arrive pas.