Tous les moyens sont bons. Pour tenter de déstabiliser la France en influençant l’opinion publique, les services secrets russes ne manquent pas d’idées. Piratages d’infrastructures, propagations de fausses informations sur les réseaux sociaux, actions en tous genres, etc., liste BFMTV. Les cinq cercueils recouverts samedi 1er juin d’un drapeau français, avec la mention “soldats français de l’Ukraine”, pourraient être l’un de ces méfaits. Dans le cadre de cette affaire, un Bulgare, un Allemand et un Ukrainien ont été présentés, lundi 3 juin, à un juge d’instruction en vue de leur mise en examen à Paris. Une enquête a été ouverte afin de déterminer s’il s’agit d’un cas d’“ingérence étrangère”. Il existe, en effet, un lien direct entre ce dossier et l’affaire des mains rouges taguées, dans la nuit du 13 au 14 mai, sur le mémorial de la Shoah à Paris, selon la chaîne d’information en continu.
Depuis plusieurs mois, la question des ingérences étrangères, russes notamment, revient régulièrement dans l’actualité. Les élections européennes et les Jeux olympiques de Paris ne sont pas étrangers à ce phénomène, selon La Guerre secrète, le long format « Ligne rouge » de BFMTV diffusé lundi 3 juin. En avril dernier, des hackers russes ont même piraté un moulin situé à Courlandon, dans la Marne. Pour rendre publique leur action, ils ont actionné une vanne à distance, afin de modifier le niveau d’eau de 20 centimètres. Rien de plus. “Rendre public le fait d’avoir réussi à pénétrer même dans une petite installation en France” est “une forme de démonstration de force disant : ‘On peut vous frapper jusque chez vous’”, commente Damien Leloup. Journaliste au Monde, il a enquêté sur ce piratage.
Des étoiles de David bleues
Une attaque parmi d’autres. “On a une offensive sans précédent, dans la mesure où elle est très résiliente et persistante”, explique Alexandre Alaphilippe, directeur de l’ONG européenne de lutte contre la désinformation EU DisinfoLab. Les offensives ne sont pas les seules armes de la Russie, qui lance également des opérations de désinformation. L’une d’elles a beaucoup fait parler. C’était à la fin du mois d’octobre, peu après le début du conflit entre Israël et le Hamas. Des étoiles de David bleues ont alors été peintes sur de nombreux bâtiments parisiens. Un couple de Moldaves a été interpellé dans le cadre de cette affaire qui a fait l’objet d’une multitude de publications sur les réseaux sociaux. Des posts réalisés par des comptes liés au réseau russe Recent Reliable News, selon Viginum, le service de l’État chargé de la vigilance et de la protection contre les ingérences numériques étrangères.
Avant cela, en novembre 2023, le ministère français des Affaires étrangères a condamné “l’implication du réseau russe Recent Reliable News (RRN/Doppelgänger) dans l’amplification artificielle et la primo-diffusion sur les réseaux sociaux des photos des tags représentant des étoiles de David dans le 10e arrondissement de Paris”. Le ministère avait d’ores et déjà parlé d’une “nouvelle ingérence numérique russe”.
Des observateurs de scrutins
Derrière le réseau pro-russe de désinformation Doppelgänger se cachent, en fait, deux sociétés russes de relations publiques : Struktura et ASP. Depuis février 2024 et les Kremlin Leaks, des fuites de données confidentielles, il est de notoriété publique que Moscou “attribuait des sommes absolument considérables, plusieurs dizaines, voire centaines, de millions de dollars, à ces acteurs”, rappelle Maxime Audinet, chercheur à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (Irsem), spécialiste de l’influence informationnelle de la Russie.
Dans cette guerre d’influence, la Russie ne se prive pas de recruter des relais d’opinions pro-russes en France. C’est le cas, par exemple, des personnalités politiques occidentales conviées à observer les scrutins. Cyril Gaucher, adjoint au maire de la ville de Talant (Côte-d’Or), s’est ainsi rendu en Russie lors de l’élection présidentielle de mars dernier. À la suite de cette expérience, il avait vanté l’organisation de celle-ci, ce qui lui avait valu d’être démis de ses fonctions.
L’enquête Ingérences russes, la guerre secrète est disponible en replay sur BFMTV.