Rami Rkab se souvient encore d’« Oncle Georges » qui l’attendait à Strasbourg un jour d’août 2015 « avec une casquette rouge ». « Après les bombardements en Syrie et un séjour très dur au Liban, le mois que nous avons passé chez lui à Obermodern, c’était comme revenir à la vie », confie le réfugié, installé aujourd’hui à Strasbourg avec sa famille. « Quand on revient à Obermodern, c’est comme si l’on rentrait dans notre village chez nos parents.»

Depuis 2014, le réseau de volontaires de la FEP Grand Est a accueilli une centaine de réfugiés du conflit syro-irakien. Bien souvent, leur prise en charge chez les accueillants s’est annoncée au dernier moment, au gré des urgences. Faute de solutions pour faire venir les réfugiés directement du Moyen-Orient, le réseau a principalement accueilli des personnes arrivées en France par leurs propres moyens et éligibles au statut de réfugiés. Beaucoup d’entre elles ont depuis trouvé un logement, certains même du travail. 40 sont encore chez des volontaires aujourd’hui.

Mais bien d’autres vont s’y ajouter dans les mois qui viennent, qu’ils parviennent à venir à l’initiative de proches déjà réfugiés en Alsace ou qu’ils soient bénéficiaires des accords sur les couloirs humanitaires. Négociée en mars par la communauté Sant’Egidio et d’autres organisations chrétiennes dont la FEP, cette mesure doit permettre à environ 500 personnes vulnérables, réfugiées dans des camps au Liban, de rejoindre la France par avion, munies de visas.

Encourager le regroupement des volontaires

Pour coordonner l’accueil de ses nouveaux réfugiés, la FEP Grand Est dispose depuis juillet d’une travailleuse sociale dédiée, Cécile Clément, installée dans les locaux de l’association l’Étage à Strasbourg. Un autre salarié de l’Étage s’occupe de former les volontaires à l’accompagnement administratif des réfugiés ainsi qu’à la transmission du français et  au soutien scolaire. La FEP est aujourd’hui à la recherche de nouveaux logements et de nouveaux volontaires pour accueillir.  « Nous avons besoin de logements où les personnes peuvent avoir accès à des cuisines et des salles de bain autonomes », détaille Cécile Clément. « Quand l’accueil dure, chacun a en effet besoin de son intimité. » La travailleuse sociale veut encourager les volontaires et les hébergeurs à accueillir en collectif les personnes. « Accueillir représente beaucoup de travail, surtout au début », explique-t-elle. « Un collectif permet de mutualiser les expériences et de ne pas repartir de zéro à chaque fois. »

Depuis deux ans, Bassel Edhar, chercheur à la retraite, organise l’accueil de jeunes Syriens scolarisés à l’université de Mulhouse, avec un groupe et une dizaine d’associations. « On se réunit chaque mois pour partager nos expériences et réfléchir aux problèmes qui surgissent », explique-t-il. «Logement, meubles, accompagnement, argent(*)… Ensemble, on a toujours trouvé des solutions. »

(*) Dans les périodes de transition administrative, les personnes n’ont pas d’allocations et ont donc besoin d’un appui financier.

Les lieux du temps zéro – Du 23 novembre au 10 février, le réseau de la FEP Grand Est propose une exposition sur l’exil vu à travers l’objectif de deux jeunes Syriens.

  • Assem Hamsho, aujourd’hui installé près de Strasbourg, a photographié la vie et le chaos des camps de réfugiés au Liban dans le cadre de sa participation à un programme éducatif pour les enfants syriens. Ses photos seront exposées à la médiathèque protestante de Strasbourg et à l’église Saint-Pierre-le-Vieux.
  • Esraa Syfou est toujours en Syrie. Avec son portable, elle a capté, au début de la guerre, l’insouciance de la jeunesse sur place. Elle destinait ces images du pays à ses frères, réfractaires au service militaire, pendant  le périple qui les a menés jusqu’en Alsace. Ses photos seront exposées à la médiathèque protestante.