Le point avec Jean-Gustave Hentz, président de la commission éthique et société de la Fédération protestante de France (FPF).

Dans quelques mois, les parlementaires français devront se prononcer sur un certain nombre de questions relevant de la future loi de bioéthique et notamment sur l’ouverture de l’AMP aux femmes seules et aux couples de femmes ainsi qu’à la GPA, aujourd’hui interdite en France. Le 11 avril dernier, la commission éthique et société de la FPF a présenté un texte1 au conseil consultatif national d’éthique qui servira de base aux parlementaires. « Ce texte est un compromis issu des sensibilités luthéro-réformées et évangéliques », prévient d’emblée le médecin et théologien Jean-Gustave Hentz, président de ladite commission et engagé au sein de l’UEPAL. « Approuvé par le président de l’UEPAL Christian Albecker », ce texte n’a pas vocation à être dogmatique mais est susceptible « de suivre les évolutions de la société et du débat dans les années à venir », tient-il à préciser.

De l’infertilité médicale à l’infertilité sociale

C’est sur l’ouverture de l’AMP que les membres de la commission éthique et société de la FPF ont dû fournir le plus de travail pour parvenir à un compromis. L’AMP est aujourd’hui réservée à des couples hétérosexuels inféconds. Si la loi autorisait son ouverture, on passerait alors d’une réponse à l’infertilité médicale à la reconnaissance de l’infertilité sociale. Aujourd’hui, les femmes françaises, qui ne souhaitent pas de contact sexuel avec des hommes et veulent se faire inséminer, vont notamment en Belgique où la loi l’autorise. « Mais ce n’est pas si simple car cela revient cher », souligne Jean-Gustave Hentz. Outre le déplacement en Belgique, une contribution financière est demandée sur place. Les paillettes de sperme congelé proviennent principalement des pays scandinaves où le don de sperme, contrairement à la France, est rémunéré. Le médecin rappelle aussi que le taux de réussite d’une insémination ne dépasse pas 20 % et que les femmes peuvent y avoir recours parfois jusqu’à quatre essais.

Le droit de l’enfant

Mais c’est sur la place de l’enfant que la commission s’est particulièrement penchée. « Pour nous, le droit de l’enfant, à partir du moment où il est né, est premier par rapport au droit à l’enfant revendiqué par des individus. » Le débat au sein de la commission a porté sur le bien-être d’un enfant dans un couple homosexuel ou dans une famille monoparentale. Le rôle de la figure masculine a ainsi été débattu en tant que modèle identificatoire dans l’évolution de l’enfant. « Certains disent que la part masculine peut être remplie par un proche, un ami, un parrain ; parfois c’est le cas, parfois non. Je constate que la figure masculine prend des coups de tous les côtés, les repères sont en train de vaciller. Pour ma part, je ne souhaite pas être dogmatique sur cette question. Ce que je vois, c’est qu’il existe des couples homosexuels avec des enfants dans nos paroisses alsaciennes et même chez des pasteurs et que c’est très bien accepté.»

Un risque de marchandisation

Sur le droit à la GPA, la commission a un avis beaucoup plus tranché envers le non, principalement à cause du risque de marchandisation du corps humain. « Avoir recours à une mère porteuse relève le plus souvent de la loi de l’offre et de la demande, affirme Jean-Gustave Hentz. La GPA coûte de 8 000 € si on va en Ukraine à plus de 100 000 € aux États-Unis. » En Belgique, qui autorise la GPA, les femmes porteuses ne se font pas rémunérer mais elles sont peu nombreuses. « De nombreux pays qui l’ont autorisée font marche arrière », constate le médecin. S’est posé aussi, pour la commission éthique et société de la FPF, le problème lié à la multiplication des références pour l’enfant, entre les parents biologiques et les parents sociaux.

1 Le texte est publié sur www.uepal.fr