Pillages de commerces, attaques contre des maires et incendies de bâtiments de l’État… Les nuits d’émeutes que la France connaît, depuis vendredi 30 juin, atteignent un niveau de violence extrême. Après la relative accalmie du week-end, un premier bilan peut être dressé, et selon certaines sources, les dégâts dépasseraient, en cinq jours, ceux des émeutes de 2005, qui avaient duré trois semaines.
De façon surprenante, la révolte n’a pas été contenue dans les quartiers défavorisés comme en 2005. Les attaques aux mortiers et les incendies se sont produits dans les centres-villes de Paris, Marseille, Lyon ou encore Strasbourg. Certaines de ces attaques ont eu lieu en plein jour et ont mobilisé plus de 40 000 policiers, dont des unités du Raid et du GIGN, relève Le Monde.
Les chiffres donnent le tournis. Dimanche 2 juillet, le ministère de l’Intérieur comptabilisait plus de 5 000 véhicules incendiés, 10 000 feux de poubelles, près de 1 000 bâtiments brûlés, dégradés ou pillés, 250 attaques de commissariats ou gendarmeries, et environ 700 blessés parmi les policiers. L’utilisation d’armes à feu, fait rare, a été relevée à plusieurs endroits, comme à Nîmes, où un policier a été atteint par un projectile, et sauvé par son gilet pare-balles. Un homme de 54 ans est mort en Guyane, dans la nuit du jeudi, touché par une balle perdue tirée par un émeutier, selon la police.
Une radicalisation des émeutiers
La radicalisation des émeutiers s’observe aussi dans les attaques contre les institutions et les élus. À L’Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne), le maire de la ville a été directement visé par une partie des assaillants. Une voiture-bélier a attaqué sa maison, et a obligé son épouse et leurs enfants à prendre la fuite.
À La Riche, en Indre-et-Loire, le maire Filipe Ferreira-Pousos a été victime de jets de projectiles dans son jardin et de menaces de mort. Son véhicule de fonction a été en partie incendié, comme l’explique France Bleu. Le patron de l’Association des maires de France, David Lisnard, fait état de 150 mairies ou bâtiments municipaux attaqués depuis mardi, une situation inédite.
Les commerces, et notamment les galeries commerciales, ont été pris pour cible, comme à Sevran, en Seine-Saint-Denis, où un Carrefour a été pillé et un magasin Action totalement ravagé par un incendie. Des dizaines de véhicules ont aussi brûlé dans la ville, tandis que certains tags affirmaient : « Vous nous avez pris une vie, on veut un policier. »
Des jeunes mieux organisés
Le secteur associatif n’est pas épargné. À Bobigny, le bus lillois pour le « Cœur des femmes » a été incendié, relate La Voix du Nord. Il sillonnait les déserts médicaux pour proposer des soins aux femmes, et transportait du matériel médical de pointe, qui est entièrement détruit. Dans le quartier de Belle-Beille à Angers, l’annexe d’un centre social a aussi été incendiée. Elle appartenait à la Maison des familles, qui regroupe différentes associations.
Comment expliquer une telle violence ? L’effet « réseaux sociaux » peut avoir joué, car les émeutes se sont propagées grâce aux plateformes de communication comme Telegram et Snapchat. Les émeutiers peuvent se donner rendez-vous plus facilement, se coordonner à différents endroits et se replier pour aller plus loin, selon Le Monde. Par mimétisme ou rivalité entre cités, certains jeunes ont multiplié les dégâts pour se vanter d’images spectaculaires.
Les jeunes sont aussi plus organisés et plus offensifs qu’auparavant. Ils utilisent parfois des drones, se renseignent sur les mouvements des policiers et barrent les rues le temps du pillage. Des opérations qui ont entraîné un bilan plus lourd encore qu’en 2005, en seulement quelques jours.
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