Les mots de Margarita Fugger-Heesen, psychologue, danseuse, fondatrice de l’association Dignity et co-réalisatrice du documentaire « Dignity : de l’ombre à la lumière » :
« J’ai constaté qu’un grand nombre de femmes ont vécu des abus sexuels, y compris dans le milieu chrétien. J’ai vu combien la honte, la culpabilité et la peur ont paralysé ces femmes, les empêchant d’entrer dans un processus de restauration, de guérison et de liberté avec Dieu. J’ai été étonnée de constater que ces problématiques ne sont que très peu abordées dans les Églises. Ainsi, ne serait-il pas possible que nous, chrétiennes et chrétiens, commencions à donner de l’espoir aux survivant·es d’abus ? Il s’agirait de leur proposer une aide spécifique et adaptée, de leur permettre d’entamer un processus de restauration, guérison du corps, de l’âme et de l’esprit. »[
Soutenir la reconstruction des survivant·es de violences sexuelles dans le milieu chrétien
Lors de ses consultations en cabinet, de ses stages, cours et enseignements, Margarita constate une grande souffrance dans la vie de nombreuses femmes qu’elle accompagne. Cette souffrance, liée aux violences sexuelles, est souvent dissimulée par un lourd manteau de honte, de peur et de culpabilité. Elle remarque aussi que beaucoup de ces femmes, qui ont été agressées sexuellement, sont en proie à un sentiment d’impuissance qui les paralyse et les empêchent d’entrer dans un processus de reconstruction.
Cet « état des lieux » la pousse à faire des recherches sur ce sujet : elle découvre alors qu’en Suisse, une femme sur cinq (Amnesty International Suisse) et un homme sur six subit des violences sexuelles au cours de sa vie (ESPAS) ; et dans huit cas sur dix, par quelqu’un qu’ils·elles connaissent. Face à ces chiffres glaçants, elle prend alors conscience de la dimension systémique des violences sexuelles.
En visionnant des documentaires et reportages sur cette problématique, elle s’aperçoit que les médias placent souvent l’accent sur l’immense souffrance des victimes, sans laisser entrevoir d’espoir, ni parler de « l’après ». Cette approche peut conduire les spectateurs·ices à détourner le regard, tant il leur est insoutenable d’être confronté·es à cette « marée de douleur ». Ainsi, le tabou déjà très présent se voit renforcé.
À ces différents constats s’ajoute une autre dimension : celle de l’Église. En effet, Margarita s’étonne de son silence assourdissant – sachant qu’elle n’est (malheureusement) pas épargnée par ce fléau. Elle comprend enfin que le milieu chrétien est souvent peu équipé pour venir en aide de façon bienveillante et adaptée aux personnes victimes de violences sexuelles commises en son sein.
Un rêve naît alors en elle, celui d’une Église qui ferait figure d’exemple en s’opposant fermement à toute forme de violences sexuelles, en accueillant la souffrance des victimes, comme Jésus le ferait, et en les accompagnant dans leur processus de […]