Tandis que certains partis politiques prospèrent en dénonçant la production d’énergie renouvelable, et se présentent comme les défenseurs des « petites gens » subissant des investissements à leur porte, ils seraient bien avisés de lire le résultat d’une grosse enquête commandée par Engie et récemment publiée par l’IFOP.

De fait Engie (dont on rappelle, au passage, qu’il a incorporé, au départ, Gaz de France) ne voulait pas une simple enquête d’opinion, mais voulait connaître avec une certaine finesse les attentes des Français et, pour ce faire, il a financé un important échantillon de 12 000 personnes, afin, notamment, de pouvoir se faire une idée du point de vue des riverains des différentes installations (éoliennes, photovoltaïque, biogaz). Le propos d’Engie n’était pas tant de faire le buzz, que d’adapter sa stratégie commerciale.

Et les résultats sont plutôt étonnants.

La proximité d’une installation existante : un contexte favorable pour demander plus d’énergies renouvelables

Dans l’ensemble les Français sont nettement favorables au développement des énergies renouvelables et ils le sont d’autant plus qu’ils habitent à proximité d’une installation existante, comme le montre le graphique ci-dessous.

Et plus ils sont près de l’installation, meilleure est leur image. C’est vrai, il faut le souligner, y compris pour la production de biogaz.

Une attitude globale plutôt raisonnable

Les réponses, dans leur ensemble, sont, d’ailleurs, assez sensées. Oui, une majorité de Français et, même, une majorité de Français votant pour l’extrême droite, ont une bonne ou très bonne image des énergies renouvelables. Ce qui distingue les électeurs d’extrême droite est qu’ils préfèrent (de peu) le nucléaire (68 % de points de vue favorables) aux énergies renouvelables (61 %).

Et, logiquement, une majorité de Français souhaitent le développement de la production d’énergies renouvelables et considèrent (pour 62 % d’entre eux) que l’on ne va pas assez vite, en France, dans cette direction.

Cela ne veut pas dire qu’ils rejettent le nucléaire : ils le considèrent comme devant faire partie du mix énergétique global.

Et cela ne veut pas dire, non plus, qu’ils ne sont pas attentifs à quelques points de vigilance, notamment le coût de production des EnR. Le bruit des éoliennes et l’odeur des centres de méthanisation sont également mentionnés et c’est là que le point de vue des riverains est intéressant : ils ne semblent pas gênés outre mesure.

De comment on construit un discours politique

Pour ce qui est de sa stratégie d’investissement et de son discours commercial, Engie a du grain à moudre.

Pour moi, tout ceci illustre la manière dont on pourrait construire un discours politique qui soit autre chose que des invectives. Il est devenu de bon ton (et pas seulement à l’extrême droite) de ronchonner contre les politiques environnementales. Il est, certainement, plus rentable, politiquement, de capitaliser sur la mauvaise humeur, la méfiance et la peur de l’inconnu. Mais une large majorité des Français semble bien plus lucide et pourquoi ne parvient-on pas à articuler un discours construit et négocié sur cette base ?

Finalement, c’est là un mystère : il y a un espace pour obtenir un consensus plutôt large sur ces questions énergétiques et pour afficher des objectifs partagés. Préférerions-nous nous détruire les uns les autres, plutôt que de nous serrer les coudes et de construire ensemble des programmes mobilisateurs ? L’époque est troublée, mais elle semblerait, sur ce point, être plus troublée par un emballement du discours politique en lui-même que par des obstacles objectifs.

« Qui sème le vent récolte la tempête » : je pensais qu’il s’agissait d’un aphorisme du livre des Proverbes. En fait, cela se trouve au milieu d’une prophétie d’Osée (8.7) qui parle des errements du Royaume du Nord. Oui, il y a un moment où l’arme du dénigrement et de la haine finit par s’autoamplifier et tout renverser sur son passage.