Aline Girard nous dit que l’enseignement du fait religieux a été introduit dans nos établissements scolaires en 2005. J’ai connu le milieu scolaire à ce moment-là et n’ai pas constaté de changement particulier. Cela faisait longtemps que les programmes d’histoire faisaient une place au fait religieux, qu’il s’agisse de l’Antiquité gréco-latine, du Moyen Âge ou de la Réforme. Il me semble que cela se faisait sans problème parce qu’on avait eu la sagesse de ne pas faire des « cours de religion » une discipline particulière, mais de confier cet enseignement aux maîtres des matières traditionnelles, que ce soit l’histoire, l’art, la philosophie, la littérature ou les sciences.

Aline Girard voit dans la soi-disant introduction de cet enseignement une tentative de mainmise des milieux cléricaux, surtout catholiques, sur l’école publique. Cela ne se voit guère. Elle fait le lien entre l’introduction de cet enseignement et le déclin des « humanités » classiques : histoire, lettres, philosophie. Il lui paraît que l’instruction se trouve dévaluée au profit de l’éducation et le cognitif au profit de l’affectif. Elle résume son point de vue en affirmant le passage de l’école, jadis lieu de savoir, en un « lieu de vie ». L’école devait former des citoyens ; la voici transformée en communauté éducative et récréative, surtout au service du commerce et de l’emploi.

À cela s’ajoute la loi Marie et Barangé de 1951, puis la loi Debré en 1959. Ces lois financent un enseignement catholique concurrent ! Par ailleurs, elle voit dans la pénétration grandissante de la religion dans l’école « une déferlante de l’irrationalité » et finalement la confusion entre la connaissance et la croyance.

Faut-il supprimer le fait religieux de l’enseignement ? Non, bien sûr, mais chacun à sa place : la religion hors des établissements scolaires d’État. Le fait religieux est là, qu’on le veuille ou non. Les débordements islamistes sont là qui nous le rappellent. Mais c’est vrai que l’école publique n’est guère adaptée à cet enseignement, particulièrement délicat quand les religions sont diverses. On voit bien, par ailleurs, que les enseignants n’y sont guère préparés. Mais, le seraient-ils, comment présenter « laïquement » et de façon juste une religion que bien souvent les enseignants ne connaissent que du dehors ?

Ce livre est très polémique. Il est vrai qu’il suscite la discussion, ce qui n’est pas un mal, bien au contraire. Il est, par ailleurs, facile à lire et vient à son heure.