Nous sommes la génération de la révolution numérique, celle vouée à vivre mieux et plus longtemps que ses parents, la génération Easyjet et blablacar qui part où et quand elle veut, fière d’avoir renversé les mœurs d’une autre époque et de s’être autodéterminé jusque dans l’usage fait de son corps.

Cependant, en franchissant toutes ces barrières nous en avons dressé bien d’autres. La distanciation sociale ne date pas de 2020. La fracture générationnelle, la polarisation de l’opinion politique autour des extrêmes, la radicalisation religieuse, l’affrontement entre régions du monde ou encore entre les grands gagnants de la mondialisation et ses « oubliés » sont autant de barrières érigées par nos soins. Même le simple « bonjour » adressé au passant casqué au regard fuyant peut désormais être perçu comme signe d’agression plutôt que de bienveillance.

En franchissant toutes ces barrières nous en avons dressé bien d’autres. La distanciation sociale ne date pas de 2020

Malgré l’omniprésence des réseaux sociaux (de l’avis de Jacques Attali « ni des réseaux ni sociaux mais du narcissisme solitaire juxtaposé ou chacun essaie de se mettre en valeur sans participer à rien avec l’autre »), nous sommes la génération en proie à la solitude et à l’angoisse. Davantage à l’aise devant les écrans que face à un interlocuteur physique, repartis par entités familiales de plus en plus éclatées dans un habitat de plus en plus morcelé, nous avons atteint un niveau inouï de consommation de psychotropes et d’accompagnement psychologique. Comme un collectif de chercheurs toulousains l’a affirmé […]