Le 10 septembre, beaucoup manifesteront exaspération et colère : crainte du déclassement, déception devant l’incapacité des politiques à donner sens à ce qui advient, doute sur la promesse républicaine, difficulté à percevoir les chemins d’un avenir économique et sécuritaire pour le pays et pour une Europe sous pression des grandes puissances.
Cette exaspération et cette colère ne sont pas illégitimes. Leur expression se focalise sur un mot d’ordre assez nouveau mais dont l’horizon laisse perplexe : « Bloquons tout ! ».
Dans l’une des étymologies de ce verbe se cache un mot qui désigne la bûche. Loin de moi l’idée de croire que tel responsable politique qui voudrait récupérer ce mouvement penserait comme une bûche ! Mais tout de même, « bloquer tout », ne serait-ce qu’un jour, est un bien piètre projet. Car après avoir bloqué, il va bien falloir débloquer. Non pas seulement le jour même, par l’action des forces de l’ordre que le ministre de l’Intérieur ne va pas manquer de mobiliser, mais par l’action politique, enfin, dès le lendemain.
Là, exit le ministre de l’Intérieur, exit la politique des récupérations, voici venu le temps des responsabilités. Après avoir, pour certains, pensé comme une bûche, il va falloir bûcher. Reformuler des alliances, proposer un budget, recréer la confiance, prononcer des discours sans coup de menton ni index menaçant mais avec l’intelligence vive de la pédagogie.
Bref, débloquer la pensée, et du même coup le pays pour qu’il arrête de « débloquer ». Et surtout, garder confiance en celui qui chaque jour nous garde et nous fait confiance.
François Clavairoly, pasteur, pour « L’œil de Réforme »