Ancien collaborateur de Pierre Méhaignerie, ancien chargé de mission auprès d’Alain Poher, François Bayrou s’inscrit dans un héritage particulier.
Si Robert Schumann (on ne parle pas du compositeur…) a marqué de son empreinte un peu de notre mémoire collective, du fait de son engagement dynamique en faveur de la construction européenne, on parie que le nom de Georges Bidault ne dit plus grande chose à la plupart de nos concitoyens. Pourtant, successeur (en partie seulement, nous devons le souligner) de Jean Moulin, ce professeur d’histoire au passé glorieux fonda le Mouvement Républicain Populaire (MRP). Le premier sondage venu conformerait l’intuition qui nous guide ici : le MRP ne dit plus rien à personne. Or, il fut le grand parti démocrate-chrétien qui ne disait pas son nom mais soutenait ses principes, une formation centrale prétendant réunir la gauche et la droite, à partir de laquelle, de 1946 à 1958, la vie politique nationale a fonctionné. Nous y voilà. Vous craigniez de vous perdre en digressions fâcheuses, en rêveries sans lendemain, vous arrivez à bon port. En bon héritier du MRP, François Bayrou reconstitue la Quatrième République.
Héritier de plusieurs courants politiques
Attention tout de même ! On sait depuis Marx et tant d’autres que jamais l’histoire ne se répète à l’identique. Disciple de Bidault, Schumann et Lecanuet, catholique assumé, François Bayrou n’est pas un enfant de chœur. Il a su depuis vingt ans moduler suivant les circonstances un certain nombre de ses convictions, soucieux de se donner le moyen de sa politique. Mais il a moins varié que beaucoup.
S’il a su naviguer d’Edouard Balladur à Jacques Chirac, et de Jacques Chirac à lui-même, il a fait preuve d’une constance qui mérite le respect. Ceci posé, cette fidélité à ses idées s’inscrit dans un champ suffisamment large, aux contours assez flous pour permettre de suivre une tactique à géométrie variable : quand on est au centre, on peut toucher les deux rives sans perdre son âme.
En attendant, c’est un homme lettres et de terrain qui s’avance au-devant des Français. Les railleurs aiment à rappeler les traits de Simone Veil à son endroit ; les suspicieux lui reprochent d’avoir fréquenté l’écrivain collaborationniste André Fraigneau. Mauvais procès. Agrégé de lettres, François Bayrou vagabonde, libre de sa sensibilité. Lors de la campagne de 2007, on avait pu parler de Gracq et Stendhal avec lui, juste à côté d’une de ces pierres levées que l’on trouve un peu partout dans nos régions ; derrière le masque de l’homme roué, nous avions ressenti la sincérité de l’amateur. En cela ressemble-t-il à François Mitterrand. Mais n’allons pas en tirer de trop puissantes conclusions…
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