Entre monokini, burkini et masques, nos libertés s’habillent ou se déshabillent…

L’automne arrive à grands pas. L’escargot en béton, posé sur un des carrefours, est peu impressionné par les débats publics ; il arbore calmement son masque. J’esquisse un sourire. Autrefois, le masque était porté comme un étendard de liberté lors du carnaval. Il élargissait la liberté d’action des femmes ; il donnait la parole à ceux qui en étaient privés. Prendre la parole et vouloir influencer le cours des choses dans un monde globalisé, cela rejoint les revendications des manifestants, en Allemagne et ailleurs, contre le port du masque. Ceux qui veulent rester entre eux sans étrangers et autres tenants d’un monde peu démocratique se retrouvent là. Dois-je supposer qu’ils avancent masqués, sous couvert de quête de liberté ? Ne pointent-ils pas là un mépris du grand âge et le rejet d’un système de santé partagé entre tous… par ceux qui peuvent sauver leur peau ? Leur peau…

Autrefois, les estivants affrontaient la mer en costume de bain. Puis, l’apprivoisement des vagues a rendu caduc ce dernier. Les maillots rétrécissaient et les enfants gambadaient nus. Mais la dynamique s’est renversée. Je vois davantage d’enfants courir dans des maillots à manches longues sur la plage ; rayons solaires et d’éventuels regards malsains obligent. Je peux me réjouir de l’attitude responsable des adultes, mais je peux également regretter la limitation de liberté sous cet attirail.

Et cette inversion des critères ne s’arrête pas à l’enfance. Les jeunes hommes portent des bermudas pour se protéger des regards… et certaines femmes sont réprimandées par des forces de l’ordre quand elles prennent un bain de soleil en bas de bikini, ou quand elles se couvrent « trop ». Se couvrir est devenu autant un acte de liberté, réelle ou supposée, que de se découvrir. De manière comparable, la question s’était posée quant au port du voile : ce geste peut être considéré comme un acte de liberté ou comme une attitude de soumission.

Aujourd’hui, si « Pénélope » proclame qu’elle a remisé son soutien-gorge, j’espère que ceci libère son quotidien. Si une femme nage avec un voile dans les vagues, je lui souhaite de pouvoir faire une expérience moins contraignante un autre jour. Si quelqu’un ne porte pas le masque requis, j’espère que ceci n’est pas un acte de bravade qui rattrape une adolescence écourtée. Car la liberté n’est pas une valeur. Elle se vit dans un monde partagé.