Je regarde les programmes des trois listes qui se présentent aux municipales, dans ma commune. Mon lieu de résidence n’a jamais attiré une personnalité politique en vue. Il s’agit d’une petite commune de 20.000 habitants dans l’Est Parisien (incluse, plus ou moins par hasard, dans le périmètre de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée). On a donc des programmes montés par des équipes locales et qui évitent plutôt d’afficher leur couleur politique (au moins pour deux d’entre elles). A lire les programmes, je me rends compte, d’ailleurs, que les listes se sont copiées les unes les autres. Sur certains points il est difficile de les départager, même si elles défendent, sur le fond, des priorités différentes.

Les catalogues de projets d’infrastructure restent la solution de facilité

Et au-delà des divergences politiques (qui sont quand même perceptibles, pour qui fait un peu attention), il y a un parti pris commun qui reste fort : ces programmes sont d’abord des catalogues de projets d’infrastructure. Les uns veulent construire une « maison » de ci ou de ça (sans vraiment s’interroger sur l’efficacité d’un tel investissement). Les autres veulent construire des pistes cyclables, des parkings à vélo, des parkings pour pouvoir accéder aux commerces. Si certains revendiquent l’idée des circuits courts, ils proposent en premier l’idée d’une ferme modèle pour encourager les projets de maraîchage.

Je m’arrête là dans ma liste : aucun ne définit clairement quelle type de ville ils proposent de construire, ou comment ils envisagent de faire évoluer la société locale. Or faire évoluer les usages de la ville est autant affaire d’accompagnement, de mobilisation des énergies locales, de proposition d’un horizon partagé, que d’investissements lourds. Même la liste la plus marquée par son orientation écologiste ne propose pas de vision globale de ce que pourrait être une commune « durable ».

Il y a là, sans aucun doute, le fruit de dizaines d’années de politiques municipales qui ont d’abord été des politiques d’équipement. Et ces équipements ont fait perdre de vue leur raison d’être. La concurrence entre communes proches a parfois été une motivation suffisante pour avoir des équipements comparables.

Entre politiques nationales et politiques locales : la même difficulté à articuler un projet de société cohérent

On retrouve, en fait, au niveau local, la difficulté sur laquelle butent les politiques nationales : ces dernières sont toujours trop technocratiques et jamais suffisamment chargées de sens. Les gouvernants manient des ressorts macro-économiques, font évoluer le droit, proposent des subventions et des taxations. Mais le sens de tout cela est plutôt mal défini et mal défendu.

Au niveau local, les préoccupations des électeurs sont souvent assez basiques. Mais les politiques ne seraient pas obligés de leur emboîter le pas. Ou, tout du moins, ils pourraient répondre à ces préoccupations basiques en fixant des objectifs plus globaux. Et faute de le faire, ils se retrouvent en train de gérer une poussière de revendications sans lien les unes avec les autres.

La seule réponse au populisme : expliciter l’intérêt de faire ensemble plutôt que de s’isoler

Tout cela est peut-être difficile à mettre en œuvre. Pourtant je pense que c’est la seule réponse qui vaille aux populismes divers : expliciter en quoi il est intéressant de participer à des projets collectifs, en quoi faire ensemble est mieux que s’isoler, en quoi coopérer est mieux que de céder au soupçon et à la haine.

En lisant les trois programmes locaux que j’ai sous les yeux, je ne trouve aucune réponse à ces questions pourtant essentielles.