Les protestants, du moins ceux de la RPR (religion prétendument réformée), n’ont pas inventé le parlementarisme, mais la Réforme dans sa version calviniste a joué un rôle indirect et significatif dans le développement des formes de gouvernement représentatif en Europe.

C’est dire combien nous sommes attachés aux débats parlementaires, aux échanges contradictoires, à la dispute et in fine aux compromis. Nous appelions de nos vœux depuis longtemps cette évolution de la Ve République… Las, c’était il y a quelques semaines encore, avant le débat budgétaire.

Depuis, l’Assemblée nationale nous offre un spectacle qui, s’il n’est pas affligeant – les députés travaillent sérieusement – relève plus d’un jeu de rôle que d’un véritable débat budgétaire. Soyons justes : les socialistes et les partis du bloc central semblent bel et bien à la recherche de compromis. Mais pour le reste, les arrière-pensées et les postures politiques en vue des prochaines échéances électorales règnent ici sans partage. Pire, la copie budgétaire du gouvernement risque, faute de majorité, d’être de toutes façons rejetée. Ou alors, le Parlement n’aura pas le temps de se prononcer, et le budget passera par une loi spéciale ou par des ordonnances.

Ajoutons-y, pour faire bonne mesure, la sentence sans appel du récent prix Nobel d’économie, Philippe Aghion, selon laquelle les députés n’ont aucune culture économique, et nous voilà face à un échec patent du parlementarisme. Le tout au moment où un désir d’ordre et d’un pouvoir fort s’installe dans notre pays… À moins que la représentation nationale, dans un sursaut bienvenu, nous donne entièrement tort.

Jean-Luc Mouton, journaliste, pour « L’œil de Réforme »

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