Le marketing frappe durement et surtout tente à s’élargir généreusement à toutes les sphères de la société avec, hélas, des résultats qui peuvent profondément décevoir si un esprit d’ouverture et de bienveillance cherche à trouver place.
Alors que les jeux Paralympiques d’hiver 2018 allaient bientôt commencer pour faire suite à ceux des valides, l’un de ces sportifs, pour sa part nombreuses fois médaillé, était interviewé à la radio. Il parlait avec ferveur et passion de son sport mais aussi plus généralement de tous ces athlètes particulièrement exceptionnels et impressionnants. Puis le journaliste l’embarqua sur la question des retransmissions télévision et radio confondues. Alors oui, il y en aura sur certaines chaines de seconde voir troisième ligne du service public, et on évoquera les médailles françaises dans quelques journaux… sans doute quelques papiers de temps en temps dans les dernières pages de l’Équipe ou un encart dans le pire des cas… mais le constat était amer tout en cherchant à rester positif. La raison fut évoquée avec franchise et simplicité. Ce n’est pas ce que les spectateurs et les auditeurs veulent voir et entendre ! Dans sa réponse, le sportif expliqua qu’il préférait pour sa part croire encore que lorsque l’on présentait de la qualité, de la différence, du talent, de la passion, alors le public était satisfait et heureux.
Cet exemple n’est hélas pas confiné à l’handisport ou au sport adapté. Depuis quelques temps, s’est en effet développé exponentiellement une certaine façon d’entrevoir le « marché », le « public », avec des techniques de marketing affutées et sans complaisance. On détermine la cible. On définit précisément ses goûts, ses tendances… On trace un portrait-robot de ceux à qui je veux m’adresser… et basta ! D’un côté, les autres, on s’en balance… et de l’autre ce qui ne va pas correspondre à cette cible fixée est aussi mis hors-jeu.
Il y a quelques années déjà, je m’étais personnellement confronté à ce genre d’attitude lors de la sortie de mon double album de slam électro-rock PAROLE. Un directeur de radio m’avait gentiment dit avoir beaucoup aimé mais qu’il ne pouvait hélas pas l’intégrer dans leur playlist car ne correspondant pas à leur cible. « Tu comprends, on a étudié les choses précisément et on connait leurs gouts et là on n’y est pas ! ». OK… même si ce genre de musique n’était jamais passé sur leurs ondes… même s’ils n’avaient même pas cherché à le faire écouter au moins par un panel représentatif… Non… on sait… on connait… c’est comme ça !
On pourrait énumérer des tas d’exemples du même acabit dans des sphères très diverses de la société. Si cette façon d’aborder les choses repose évidemment sur certaines vérités… si elle s’avère efficace dans bien des cas, on ne peut malgré tout que se désoler de sa généralisation et d’une certaine peur, frilosité qu’elle génère obligatoirement chez bien des décideurs. Autre conséquence, une uniformisation de plus en plus forte de l’offre, une aseptisation des propositions, et une perte d’originalité et d’audace chez ceux qui produisent dans un domaine ou un autre. Il demeure heureusement toujours des « marchés alternatifs » mais la visibilité est réduite avec son lot de frustrations et de manque de moyens.
Alors osons sortir des sentiers battus du « bien pensant », des modes d’emploi tout fait, d’une vie façon fast-food, de cette robotisation de l’humain. Osons la différence et militons pour qu’elle puisse trouver place au milieu du reste et comme le reste. Entretenons cette soif d’altérité, d’originalité, d’innovation, de créativité. Refusons les schémas faciles de modélisation pour qu’un vent de liberté et de fraicheur ne cesse de souffler. N’acceptons pas, autant que faire se peut, d’être figés dans des boîtes identifiées et bien closes.
Non je ne suis pas la ménagère de moins de cinquante ans !… Je ne suis d’ailleurs pas ménagère et je viens tout juste de dépasser le ½ siècle. Je ne suis pas non plus le chrétien 100% « pop-louange »… je crois au Christ mais j’écoute de la pop, du classique, du rock, du baroque, du jazz, du reggae, de la soul, du métal, de l’électro, du folk… juste un léger problème avec le musette. Je lis des essais, de la poésie, des romans mais j’aime aussi un bon magazine (voir même discrètement quelques pages people dans la salle d’attente de mon médecin généraliste, mais ne le répétez pas). Je me délecte au cinéma devant un bon blockbuster hollywoodien comme devant un film d’auteur en VOST et ne crache pas de temps en temps sur un vieux Walt-Disney ou le dernier Pixar. Je mate Walking Dead ou Stargate SG1 comme je m’éclate devant The last man on earth ou une énième fois Colombo ou La petite maison dans la prairie. J’hurle « Paris est magique » en chambrant mes copains marseillais et me laisse dans le même temps émerveiller par un match de basket en fauteuil, les exploits de Philippe Croizon, un coucher de soleil sur la côte charentaise, ou le vol d’une buse dans le marais prête à tomber sur sa proie. Finalement, je ne suis qu’un homme comme tous les autres… fait de paradoxes, de désirs, d’envies, de fougue et de doutes… qui change tout au long de son existence et demeure aussi un peu le même. Je suis un homme qui refuse d’être étiqueté, labellisé… tout en sachant qu’il l’est, malgré tout, contre son gré…