La conception traditionnelle de la charité chrétienne, et de l’accueil, a été élaborée dans le contexte d’un monde peu peuplé. Elle doit aujourd’hui être repensée dans un monde de 8,2 milliards d’habitants, dont l’augmentation de 80 millions chaque année entraîne destruction de l’environnement, famines et guerres. C’est déjà ce à quoi appelait l’historien américain Lynn White dans son article « The future of compassion », publié en 1978. Selon lui, il en allait de la responsabilité que le christianisme pourrait avoir dans la catastrophe à venir.

Or, force est de constater que la démographie est toujours dans l’angle mort des prises de position théologique et ecclésiale sur l’immigration, alors qu’elle lui est intimement liée. En effet, les migrations vers les pays occidentaux ont presque toujours pour origine des ressources devenues insuffisantes au regard de la taille de la population, et leur partage par la force entraîne l’éviction des plus faibles.

Pourtant, les Églises continuent à répondre au drame migratoire selon les canons d’une éthique de conviction – « le chrétien fait son devoir, pour le résultat de l’action il s’en remet à Dieu » – en se contentant de parer à l’urgence humanitaire. Ce qui est contraire à l’Évangile, qui exhorte les chrétiens à agir de manière responsable, en répondant des conséquences prévisibles de leurs actes.

L’Église devrait s’opposer au tabou démographique entretenu par les pouvoirs publics et s’engager pour un volume de population écologiquement soutenable. Cela implique de ne pas se contenter de s’occuper des victimes de la surpopulation, mais d’arrêter son engrenage meurtrier.

Martin Rott, juriste, pour « L’œil de Réforme »

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