Dans son 12e rapport annuel de recensement de la mortalité des SDF, publié mercredi 30 octobre, le collectif Les Morts de la rue annonce qu’au moins 735 personnes sont mortes dans la rue en 2023. L’association dénonce un « triste record » en comparaison avec les 638 décès qu’elle avait dénombrés en 2022. Elle souligne que « cette augmentation par rapport aux années précédentes pourrait être le reflet à la fois d’une détérioration des conditions de vie pour ces populations, mais aussi d’une amélioration du recensement », rapporte franceinfo. Le rapport révèle que l’âge moyen de décès des personnes dans la rue est de 48,8 ans, contre 79,9 ans pour la population générale, ce qui montre que la mortalité des SDF est « massive et précoce ».
Neuf victimes sur dix sont des hommes et ces décès ont lieu majoritairement dans la rue et dans l’espace public, pour 32% des cas. De plus, 30% de ces morts se produisent dans un lieu de soins. La saison la plus meurtrière est l’hiver, qui représente 31% des décès, devant l’automne et l’été (23%) et le printemps (21%). Le collectif rappelle que le nombre de sans domicile fixe a doublé en une décennie pour atteindre 330 000 personnes SDF en 2023 et que ces décès sont « occultés, parfois oubliés ». Toutefois, le rapport ne présente qu’une « vision partielle de cette sombre réalité, car de nombreux décès attribuables au sans-abrisme nous échappent », notent Les morts de la rue. Ainsi, le nombre réel de décès des personnes sans abri pourrait être six fois plus important.
Des mesures anti-SDF prises par plusieurs communes
Le rapport a recensé 735 personnes sans habitat personnel, c’est-à-dire qui vivent à la rue, en hébergements d’urgence, dans des squats ou dans des structures de soins. Mais, si l’on ajoute les personnes ayant à un moment de leur vie connu le sans-abrisme, ce nombre monte à 826 personnes, indique Le Parisien. Le journal cite Bérangère Grisoni, présidente du collectif Les Morts de la rue, qui explique que « lorsque les personnes ne sont plus sans domicile, leur espérance de vie augmente environ de dix ans, mais elles décèdent quand même souvent vers 60 ans ». La présidente du comité déplore également les mesures prises contre les SDF dans plusieurs villes comme des arrêtés municipaux anti-mendicité pris à Amiens, Angoulême ou Charleville-Mézières. Certaines communes ne construisent pas de logements sociaux et préfèrent payer des amendes, tandis que des arrêtés préfectoraux interdisent les distributions alimentaires. « Les politiques publiques ne se contentent plus d’occulter les personnes les plus démunies à la rue, elles les attaquent », insiste Bérangère Grisoni dans les colonnes du Parisien.
Dans son 29e rapport sur l’état du mal-logement en France publié en janvier 2024, la fondation Abbé Pierre déplorait « l’absence de réponse réelle du gouvernement à la crise du logement ou ses propositions ponctuelles et sectorielles qui ne traitent pas au fond les causes de la crise ». Pour faire reculer le mal-logement, la fondation préconise plusieurs actions urgentes pour le gouvernement. Parmi elles, « relancer le financement du logement social, revaloriser les APL, rehausser les minima sociaux, soutenir le travail social, généraliser l’encadrement des loyers, ériger en priorité nationale que plus personne ne dorme à la rue, en prenant appui sur la philosophie du Logement d’abord ». Cette politique, inspirée du concept américain Housing First, permet aux personnes SDF les plus fragiles d’accéder directement à un logement ordinaire et d’être accompagnées vers la réinsertion. Ces personnes ne passent pas par un centre d’hébergement temporaire. Une fois logées, elles sont accompagnées au quotidien par une équipe médico-sociale pluridisciplinaire. Le logement, droit fondamental, sert alors de tremplin pour faciliter les soins et l’inclusion sociale.