On utilise, la plupart du temps, l’adjectif « solidaire » ou le substantif « solidarité » pour parler d’un acte volontaire. Mais il existe d’autres usages, en français. On parle, dans un ensemble mécanique, de pièces solidaires les unes des autres, pour signifier qu’un mouvement imprimé à n’importe laquelle d’entre elles, entraîne toutes les autres. Le mot est dérivé de « solide » et, dans ce sens, il signifie une communauté de destin : nous sommes liés par les choix des autres, sans que nous le voulions.
Solidaires face aux épidémies
Depuis l’année 2020 nous nous redécouvrons solidaires devant les épidémies. Ceux qui réclament plus de liberté de choix, ignorent, souvent, que leur choix a des conséquences sur les autres et que les autres n’ont pas envie de subir les conséquences de leur liberté. De fait, pro et anti-vaccin sont solidaires les uns des autres, même s’ils se critiquent les uns les autres.
Et, dans ce domaine, nous sommes solidaires au niveau international, car, là où le virus circule, il mute. On ne peut donc pas se laver les mains de ce qui se passe ailleurs (où que ce soit) sur la planète.
Solidaires face aux menaces environnementales
Nous subissons, de même, les conséquences de la pollution émise par les autres et les autres subissent les conséquences de notre pollution.
Le climat est un tout, et même ceux qui s’imaginent à l’abri de résidences climatisées, surveillées par des gardes armés, finiront par en subir les conséquences.
Le climat est résistant aux opinions : quel que soit ce qu’on en pense, il suit son cours. Les multiples substances chimiques, que nous répandons à droite et à gauche, agissent, elles aussi, de la même manière sur ceux qui dénient leur influence et sur ceux qui l’admettent.
Solidaires face aux choix politiques de nos concitoyens
En cette année électorale, nous savons que nous devrons faire avec le président, puis les députés, qui sortiront des urnes. Nous devrons vivre, ensuite, pendant 5 ans, avec les conséquences des choix du corps électoral, que ce soit notre choix ou non.
Il est de bon ton de critiquer les mesures gouvernementales, ou les décisions des élus locaux. Mais, en France tout du moins, ils ont été élus. Nous n’avons pas forcément voté pour eux, mais d’autres l’ont fait.
Les prophètes : solidaires, eux aussi
Dans bien d’autres domaines nous sommes dépendants des choix et des pratiques d’autres acteurs. Mais je me suis limité, ici, à des domaines où nos propres choix pèsent sur la vie d’autres que nous.
Tout cela appelle, en conséquence, les chrétiens à un sursaut prophétique. Et, tandis que nombre d’entre eux sombrent dans la facilité et la passivité, il faut souligner que d’autres parlent et agissent avec courage.
Mais il faut noter, à ce propos, que la plupart des prophètes de l’Ancien Testament, ont partagé le sort d’un peuple qui ne les écoutait pas. Dans les grands moments de naufrage, les prophètes sont entraînés avec leurs contemporains, même s’ils leur avaient donné les moyens d’échapper à la catastrophe. Ézéchiel est exilé avec une partie du peuple, à Babylone. Jérémie est entraîné contre son gré, en Egypte (Jr 43.6), alors qu’il avait adjuré le roi de ne pas s’y replier. Dieu calme Baruch, le secrétaire du même Jérémie, qui formait de grands projets, en lui disant qu’il ne peut pas échapper à la débâcle (il lui laisse, simplement, la vie sauve) (Jr 45). Et dans les apocalypses diverses du Nouveau Testament, il n’est dit nulle part que les chrétiens échapperont aux malheurs provoqués par l’injustice et l’aveuglement des hommes. Jésus, pour sa part, pleure sur Jérusalem, et sa destruction future, parce que ses habitants ont refusé le salut qu’il leur apportait. Mais c’est lui qui meurt le premier, quelques jours plus tard, sur la croix (Lc 19.41-43).
Voilà peut-être des considérations bien sombres, pour débuter cette année 2022. Mais, sombre ou lumineux, notre avenir s’écrit au pluriel, et il est temps, pour chacun, d’arrêter de se rêver comme des personnes qui peuvent se livrer sans limite, ni dommage pour les autres, aux aléas de leur fantaisie.