Président de la Fédération protestante de France, le pasteur François Clavairoly avait appelé, dès vendredi, à participer à cette marche. «L’élan de fraternité qui nous anime et la volonté de réaffirmer de façon solennelle notre attachement aux valeurs qui fondent la République doivent nous mobiliser, expliquait-il dans un communiqué. La liberté de conscience, au principe même de la foi protestante et vécue au nom de Jésus-Christ, est imprenable.»
Au lendemain de la marche et des autres manifestations auxquelles il a participé dimanche, François Clavairoly a répondu aux questions de Protestinter. « J’ai vécu cette marche comme un moment républicain, dit-il, un moment très intense de communion laïque, où les sentiments de détresse, de tristesse se sont mêlés aux sentiments de grande confiance et de détermination pour l’avenir. »
La presse s’interrogeait ce matin sur les suites possibles à cet élan de solidarité. Quelles pourraient-elles être selon vous ?
Tout monde l’a dit, il y aura un avant et un après janvier 2015, tellement le choc a été brusque et violent. L’après, c’est d’abord de faire prendre conscience que tous les citoyens ont un rôle, une responsabilité à exercer, dans l’exercice du vivre ensemble. Tous sans exception. Le grand nombre de jeunes qui a participé à ces marches d’unité et de solidarité me rend optimiste. Une manifestation peut être une épreuve qualifiante, un moment charnière dans la vie d’un jeune, l’événement fondateur d’un engagement citoyen. Je pense que beaucoup de jeunes se souviendront de cette journée triste et heureuse en même temps comme d’un événement marqueur de leur vie. L’autre après concerne la laïcité.
Avec la République, nous sommes passés d’un régime de catholicité à un régime de laïcité. Ce régime de laïcité, les protestants l’ont coproduit et les catholiques y ont consenti: c’est aux musulmans maintenant de s’y engager. Croire, c’est penser! Cette phrase de Paul Ricœur est aujourd’hui plus que d’actualité: croire ce n’est pas simplement pratiquer et défendre sa religion, c’est aussi la penser, c’est-à-dire la passer au feu de la critique et de la raison. Et quand la religion devient folle, il faut la soigner.
Certains affirment que les trois terroristes n’étaient pas directement responsables de leurs actes. On a même invité à prier pour eux…
Il faut arrêter de dire que les terroristes sont des irresponsables: cela revient à faire croire qu’il y a des excuses à assassiner des gens à la kalachnikov en plein Paris. Et on ne prie pas pour les morts. Ils sont dans les mains de Dieu. Les morts ne nous appartiennent pas. On peut bien sûr penser aux familles de ces djihadistes qui doivent être dans une immense détresse.
Dimanche soir, j’ai participé à la cérémonie de la grande synagogue de Paris avec l’allumage de 17 bougies. C’est une femme musulmane, la mère de l’un des deux militaires assassinés par Mohamed Merah à Toulouse en 2012, qui a allumé la dernière. Cela avait un sens: la réconciliation des vivants.